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#1 04-03-2008 14:26

Silmo
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Messages : 4 019

propriété intellectuelle


Dans ce fuseau...

Silmo a dit :
moi,ce que j'aime pas du tout, c'est que les droits d'auteur et tout ce qui relève de la propriété intellectuelle (droit de suite, droit de reproduction et Cie) - qui sont certes des droits légitimes et mérités - se prolongent 70 ans après le décès d'un artiste ou d'un auteur. Ca devrait s'éteindre avec eux ou bien, selon les cas, avec leur veuf/veuve ou à la majorité des orphelins. Mais ce n'est pas le lieu pour s'énerver de ce genre de choses. Oublions ça
et
Hisweloke a répondu:
Je ne peux pas être d'accord, alors allons pour un peu de hors sujet (qu'on a déjà évoqué dans le passé d'ailleurs):

S'éteindre avec l'auteur, c'est dur s'il meurt juste après avoir publié... Tu achètes une maison (un patrimoine), tu meurs sec, pouf, elle appartiendrait à tout le monde... Pareil pour le veuf/veuve ou pour les orphelins, avec toute la complexité des contrats de mariage, le fait que tu peux ne pas avoir de descendant direct mais un tas de petits neveux et nièces, etc... Du coup, ce que tu critiques n'est en fait pas tant un problème de propriété intellectuelle que de droit d'héritage... On peut être contre (après tout, est-ce qu'il est normal que tu hérites de la maison ou de l'argent de tes parents, leur dur labeur mais pas le tiens pour autant ?), mais c'est une question bien plus vaste.

Le coup des 70 ans (grosso modo, cf. plus bas), c'est l'idée de reconnaître l'écrit comme un patrimoine (qu'un ayant-droit peut hériter etc. comme une maison), mais tout en le limitant, c'est à dire en reconnaissant aussi en même temps (contrairement à la maison!) que ce patrimoine est d'ordre culturel et donc qu'au bout d'un moment il peut être partagé. A bien y réflechir, je ne trouve pas cela injuste. On peut discuter de la durée, mais dans le fond, l'idée me paraît plutôt juste. C'est un héritage limité, quoi.

De la durée, donc... Déjà, cela dépend des pays. En France, le droit d'auteur se décompose en droit moral et droit d'exploitation. Le droit moral est inaliénable, imprescriptible et perpétuel (t'es toujours reconnu comme l'auteur). Ce qui est protégé jusque 70 ans après le décès de l'auteur, c'est le droit exclusif d'exploitation par l'auteur et ses ayant-droits (L. 123-1). Pour les oeuvres posthumes, c'est aussi 70 ans après le décès de l'auteur, sauf si les oeuvres sont publiées après cette période, auquel cas on dispose de 25 ans après la publication. Il y a une clause spéciale au cas où la divulgation a lieu exactement à l'expiration des 70 ans (on relance de 70 ans après le décès du propriétaire - pas nécessairement ayant-droit - qui fait effectuer la publication, L. 123-4 encore) et pour les morts pour la France, et je vous passe le détail des droits de suite car c'est encore plus compliqué...

A ma compréhension du texte, si Tolkien avait été publié en France, le SdA serait couvert jusqu'en 2043 (=1973+70), de même que le Silmarillion de 1977 (et probablement aussi tous les HoME sans les commentaires de Christopher (qui sont de sa propre propriété intellectuelle), etc. Si un texte posthume devait être publié après 2043, il serait protégé pendant 25 ans après sa publication en droit français (ce qui est, je crois comprendre, donc une protection pour celui qui publie, octroyée puisque personne d'autre ne l'a fait alors qu'il le pouvait dorénavant, mais Romaine lit ça autrement... Bon, c'est compliqué, ok)...

C'est un peu différent en droit anglais (où la propriété intellectuelle n'est pas inaliénable, elle est cessible à autrui, si je me souviens bien), mais je connais moins...

Mais sur le principe général, ça me semble sain... Après, est-ce que 70 ans c'est trop ou pas assez... Il faut bien fixer quelque chose, sauf à nier toute idée de droit. Plutôt qu'un héritage, c'est comme une sorte de location (pendant 70 ans après ton décès, tes ayant-droits peuvent vivre du droit d'exploitation, comme s'ils louaient ta maison) limitée dans le temps.

Si on veut nier ça, ok. Alors il faut en revenir à une cession de la propriété intellectuelle. Soit : l'auteur doit pouvoir vendre tout son droit, mais au juste prix. Vous y croyez, dans ce monde ? Je gage que le SdA n'aurait jamais été publié dans un tel monde. Simplement trop cher pour un public à l'époque incertain. C'est finalement *rire* une question marxiste : l'auteur ne possède pas le moyen de production dont il est prolétaire... ;)


J'ai déménagé le contenu de ces deux posts dans la présente section pour y poursuivre la discussion même si nous n'avons pas forcément des positions si éloignées que ça, quoi qu'il en paraisse.

Je confirme que je trouve le droit de propriété et les droits afférents légitimes et mérités.
Je connais moins la situation des écrivains et musiciens que celle des artistes plasticiens (dont le système protection juridique est plus récent), sujet que j'ai eu l'occasion de côtoyer sans être du tout spécialiste de la question mais je crois que les mêmes principes gouvernent leur régime de protection de la propriété intellectuelle.

J'aurais dû développer un peu pour ce qui concerne les ayant-droits (veuf/veuve, enfants, neveux et nièces, etc...).

Pas d'objection à ce qu'ils héritent des biens matériels provenant du dur labeur de leurs parents dans les conditions ordinaires des droits de succession (biens immobiliers et mobiliers, actifs, etc...).
Nous conviendrons sans doute qu'il n'en va pas de même du talent artistique qui ne peut se transmettre devant notaire (la transmission chromosomique fait débat - la question s'est posée pour les musiciens).

Reste donc l'immatériel...

Il est normal que les héritiers aient un droit moral sur l'Oeuvre de l'artiste (comprise ici - avec une majuscule - dans son ensemble) et disposent de moyens pour exercer sa protection ou sa promotion.

Ils peuvent même le faire tout en exerçant leur propre talent d'auteur comme le fait Christopher Tolkien.

Vu sous cet angle-là, il n'y a que la durée qui ferait débat.

Mais ce qui me dérange c'est quand les conditions, dont les délais, prévues pour l'exercice de la protection et la promotion d'une Oeuvre servent tout autant à son exploitation. Autrement dit, c'est depuis que les textes sur la propriété artistique et littéraire ont perdu leur vocation initiale.
(par exemple, les travaux de Christopher Tolkien me semblent relèver de la protection et de la promotion tandis que la Tolkien Estate sombre dans l'exploitation - peut-être me direz-vous que l'un ne pourrait exister sans l'autre?)

Car là où je commence à désapprouver le système, c'est quand des héritiers s'installent sur une rente de situation et qu'un droit lié au droit moral se transforme en droit patrimonial (pas au sens 'patrimoine culturel' mais 'notarial') et quand les héritiers sont moins inspirés par la défense de l'artiste que par la capitalisation de sa production intellectuelle. C'est un mélange des genres trop fréquent et qui me fait dire que le système n'est pas bon.

Prenons chez les plasticiens (peintres, sculpteurs, etc...) l'exemple du droit de suite - équivalent du droit d'exploitation dans les autres secteurs - selon lequel un faible pourcentage de chacune des ventes successives d'une œuvre d'art est reversé aux héritiers de l'artiste qui l'a produite, ceci pendant les fameux 70 ans après décès du créateur. L'histoire veut que ce droit ait été créé en France (il est aujourd'hui européen) après l'émotion provoquée par l'état de dénuement de la petite-fille de Jean-François Millet, alors que la revente de 'l'Angelus' venait de rapporter une somme considérable à son propriétaire.
Le droit de suite a donc eu, à la base, une vocation purement sociale liée au droit d'auteur et qui tendait à rétablir un équilibre entre la situation économique des plasticiens et celle des autres créateurs (compositeurs, écrivains, etc.) qui, eux, tiraient déjà profit des exploitations successives de leurs œuvres.

Qu'est devenu ce droit social? Un vrai filon pour certaines familles* et la mine d'or entière pour les sociétés de perception des droits (cf. la SACEM pour la musique ou l'ADAGP chez les plasticiens).
La plus grande part des droits perçus profite à une poignée tandis qu'une très large majorité des adhérents ne reçoit que des clopinettes, les sociétés de perception se sucrant largement au passage.

* je n'ai pas besoin de citer un grand artiste Catalan mort en 1973 dont les droits seront exploités (c'est le mot qui convient) jusqu'en 2043 par des héritiers pour la plupart très très très loin du talent de ce créateur. Ils auront juste eu celui strictement financier de céder fort cher le nom de leur père et grand-père à un constructeur automobile pour que la signature d'un génie figure en série limitée au cul de bagnoles moins bien carrossée que les demoiselles d'Avignon

Je saisis, Didier, l'image que tu proposes d'une location que les héritiers continuent d'occuper. D'accord pour ne pas les chasser avant l'expiration du bail quoique je trouve le bail en question beaucoup trop long mais ça se discute.
Dans tous les cas, les locataires ont la charge d'entretenir la location mais ils ne devraient pas pouvoir sous-louer, transformer ou pire vendre à la découpe cette part de l'Oeuvre dont ils ne sont pas propriétaires. Et le problème alors, dans le système actuel, c'est que ce sont les locataires indélicats qui devraient porter plainte contre leurs propres agissements. :-)

Silmo

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#2 24-03-2014 17:22

Silmo
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Re : propriété intellectuelle

Remontée d'un vieux fuseau, plutôt qu'en ouvrir un nouveau,  afin de signaler à tous ceux que ça intéresse que le calculateur du domaine public est en ligne :  calculateurdomainepublic.fr

Sous cette appellation quelque peu technique se cache le prototype(version Beta)  d'un outil permettant de s'assurer, à partir des métadonnées de la BnF, qu'une œuvre littéraire et son auteur sont libres de droits patrimoniaux.

Silmo

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#3 24-03-2014 18:17

Elendil
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Re : propriété intellectuelle

Concept très utile. Semble fort bien fonctionner pour les œuvres encore sous protection du droit d'auteur (tests : Stephen King, J.R.R. Tolkien, Guillaume Apollinaire). En règle générale, pas de souci non plus quand l'auteur est fort lointain (tests : Chrétien de Troyes, François Rabelais). Ne fournit pas de réponse dans un nombre considérable de cas où l'œuvre semble libre de droits (tests non concluants : Marcel Proust, Jules Verne, Victor Hugo, François-René de Chateaubriand, Pierre Corneille et Cicéron [!]).

Autre défaut, l'outil est fort lent. Il eût également été intéressant de savoir à partir de quelle date un auteur donné tombera dans le domaine public si la loi n'est pas modifiée entre-temps (mettons Apollinaire, pour qui ce sera en 1919, si je ne m'abuse). Bref, c'est une très bonne idée, mais qui mérite que la BNF continue sérieusement à y travailler.

Elendil

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#4 24-03-2014 21:01

Silmo
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Messages : 4 019

Re : propriété intellectuelle

Si la loi change, il n'y aura qu'à modifier les règles de calcul.  :-)

Quant aux erreurs, espérons que c'est à mettre sur le dos de la version Beta :-((
.. qui n'a pas l'air de pas refuser de répondre à tous coups : par exemple, on obtient une réponse sur Chateaubriand en faisant une recherche sur l’œuvre Atala !

... et qui calcule effectivement que Guillaume Apollinaire reste protégé alors que son œuvre est désormais dans le Domaine public après qu'ont échu les comptabilités spéciales applicables aux 'morts pour la France' : Apollinaire est tombé dans le domaine public le 29 septembre 2013, la maladie qui l'emporta ayant été aggravée par sa blessure reçue au front (et surtout au Front)
cf cet article

Bref, l'outil a encore besoin d'être amélioré hmm

Silmo

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