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Oups , je me rend compte que j'ai été beacoup trop préssée tout à l'heure ..
Ce que je voulais dire -par rapport à l'exemple de l'incendie - c'est que Frodon correspond au cas de la seconde mère ( celle qui tente tout ...).
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Mais non, Owina, Frodon n'est pas semblable à la Première mère! celle-ci a été jusqu'au bout: elle n'a pas échoué, elle est morte.
Si Frodon avait sauté dans les crevasses du Destin, il aurait sauvé le monde !
Merci quand même de ton effort !
Mj
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Tiens moi,moi aussi j'ai confondu! enfin peu importe, je crois que nous nous sommes comprises !
Mj
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Non encore désolée , Frodon est semblable à la mère qui tente tout et meurt .
Frodon aussi est allé jusqu'au bout , il n'a pas échoué par sa volonté par son choix : il est anéantit par l'anneau- c'est comme s'il était mort ( d'ailleurs pour moi c'est la raison principal de son incapacité à vivre )
Et là je recite les extraits des lettres de Tolkien -que Ylem a déjà cité :
"Je ne vois pas moi-même que la destruction de son esprit et de sa volonté sous la pression démoniaque et après torture (soit plus un échec moral, que la destruction de son corps aurait été, s’il avait été étranglé par Gollum et écrasé par la chute d’un rocher. "
Sur ce je m'arrête dans mon argumentaire ..
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Je ne suis pas théoricienne, alors je vais faire simplement.
Frodon n'a pu rejeter l'anneau pour 2 raisons je pense:
-la première est la plus évidente: il se trouvait au plus près de la source du "mal". Il était à l'endroit même où avait été forgé l'anneau. Qui aurait pu résister à cela?
-la seconde est l'échec prévisible dû à son esprit. Frodon est résigné dès le départ, il sait (ou devine un peu faussement comme on l'a constaté) qu'il ne reviendra pas ou qu'il reviendra avec des blessures inéffaçables. Il a conscience dès le départ que plus rien ne sera jamais comme avant, et il sait qu'il ne peut rien faire pour changer cela. Il est contraint, résigné et donc perd tout espoir de fin heureuse pour lui. Il lutte dès le départ contre l'anneau certes, mais aussi contre lui-même.
Alors quand enfin il en vient à accomplir sa tâche, non, il ne peut pas. Il a tout perdu...et que lui restera-t'il?
Que certains ne soient pas trop prompts à juger cet acte. Auriez-vous pu faire ce qu'il afait et subir ce qu'il a subit? Pour ma part, je l'ai admiré de sa résistance incroyable à tout cela. (même si je maintiens qu'il est plaintif et égoïste!)
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Je pense effectivement qu'il est sage de s'incliner ! on n'y arrivera pas, ce n'est pas possible !
Ce n'est pas grave l'essentiel est de se dire que c'est un bon roman et que nous y trouvons tous beaucoup de plaisir !
sans rancune !,-))
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Owina > Non encore désolée , Frodon est semblable à la mère qui tente tout et meurt.
Mais, chère Owina, je n'ai pas l'impression que Frodo meurt.
Tu dis : > Frodon aussi est allé jusqu'au bout - oui comme la première mère - > il est anéantit par l'anneau- c'est comme s'il était mort (d'ailleurs pour moi c'est la raison principal de son incapacité à vivre ). Je suis désolé, mais pour un mort, il se débrouille encore bien. Il faut faire la distinction entre perdre le goût à la vie et perdre la vie. Si l'esprit de Frodo avait été réellement anéanti, Sam n'aurait récupéré qu'une coquille vide. Ainsi je trouve que le Professeur exagère et fait une petite erreur dans son propos lorsqu'il dit "Je ne vois pas moi-même que la destruction de son esprit et de sa volonté sous la pression démoniaque et après torture (soit plus un échec moral, que la destruction de son corps aurait été, s’il avait été étranglé par Gollum et écrasé par la chute d’un rocher.".
Je trouve les investigations de MJ très intéressantes ...
Yyr
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Et cher TB, j'aime beaucoup ton post également :) Je ne puis m'empêcher de te trouver un peu dur ... je suppose que c'est la (juste ?) réaction à l'angélisme dénoncé :), mais n'évinces-tu pas le mystère du Mal (éprouver le désir de frapper est une chose, choisir entre passer à l'acte et maîtriser ce désir en est une autre ;)) ?
Ton exposé est intéressant à plus d'un titre, et entre autre, il montre quelque chose qui n'a pas été intégré jusqu'ici, à savoir que l'Anneau, sa Tentation, et sa destruction, ce n'est pas seulement le Mont Destin, c'est avant tout un chemin. Pas uniquement un chemin d'embûches et de fatigue, mais aussi un chemin de choix, de tentations et de chutes (et pas forcément liés à l'Anneau lui-même) ... qui participent au choix (non choix ?) final. (Ainsi, effectivement, je veux bien croire que l'échec de Frodo pouvait être pré-visible, dès lors qu'à la première tentation, il ne parvient pas à jeter l'Anneau dans sa cheminée !)
Je crois aussi comme toi que Frodo était le plus "endurant" (mais pas forcément celui qui résistait le mieux à la Tentation), et que Sam eût été le plus apte à la fin ... mais il faut relever que ce qui lui donne, à ce magnifique Sam, de se dépasser et de vaincre la Tentation de l'Anneau, c'est ... son amour pour un Frodo accablé par l'Anneau (donc si on retire l'Anneau à Frodo, on retire peut-être la fermeté à Sam) ... le mystère du Bien ? ;)
Il m'apparaît tout aussi évident que la quête avait une chance de succès a priori sinon elle n'aurait pas été tentée - je n'ai pas l'impression que le Conseil s'en soit remis à la seule Providence - dis avec moins de style que toi :)
Enfin, de la part d'un de mes parents, du Peuple d'Aulë, je suis chargé de te remercier pour avoir rétabli la vérité par rapport au vol éhonté et inqualifiable du Coeur de la Montagne, l'Arkenstone ! C'est honteux de dire que Bilbo y a agit par altruisme (mais rassure-toi, cher Ylem, je n'ai pas donné ton nom à mon parent ; il m'a menacé, torturé, mais je n'ai rien dit ;))
Yyr
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Bon ... après le Shibboleth de Ylem ;) le Shibboleth de Yyr je suppose :) ... - en apparté et concis -
Cynewulf > Jean > ... Tout d’abord Tolkien a dit lui même dans une de ses lettres « le SdA est une œuvre entièrement catholique inconsciemment au début mais CONSCIEMMENT dans sa révision ».
Oui*. Je suppose que, si quelqu'un pouvait encore l'ignorer sur ce forum, tous pourront maintenant en rêver la nuit ;).
Il n'a pas dit en revanche qu'il était pertinent d'en faire un élément de lecture a priori de son oeuvre. Les reflexions qui vous ont été faites ne concernent pas les fois où vous avez proposé une lecture chrétienne a posteriori mais celles faites a priori, qui ont le tort, pour la méthode de partir sur une hypothèse arbitraire sinon spécieuse**/***, pour le sens de n'en prêter aucun autre à l'oeuvre que celui de l'intention***, et pour l'enchantement de le mettre à mal****.
Sans compter que si Tolkien a méthodiquement viré toutes les références explicitement chrétiennes de son Oeuvre, c'était peut-être pour une bonne raison, non ? Pourquoi les y remettre ? :) En revanche, rien n'empêche d'y faire appel, non en amont mais en aval : pour parler de ce que *produit* le conte. Ainsi lui-même n'hésite-t-il pas à employer dans ses lettres les références chrétiennes pour *décrire* la terre-du-Milieu « selon lui (comme un autre) », exactement de la même façon qu'il l'emploit pour parler de notre Monde (primaire). Notez des mot comme « exemplifies », mis en italiques par lui-même. Pour Tolkien, la dialectique chrétienne, théologique, est un langage qui permet de mettre en valeur le sens de son monde, pas le pourquoi.
Si vous vous sentez obligés de poser des énoncés externistes en pré-requis, ce n'est pas de l'applicabilité, c'est de l'allégorie, et c'est que l'auteur a mal fait son boulot, que le sens du conte ne peut être atteint par lui-même.
Plutôt que de dire la chrétienté du SdA *à cause de* celle de l'auteur (qu'est-ce que j'en connais, de sa foi ? de sa relation intime avec Dieu ? et qu'est-ce que je connais des "impuretés" de sa foi qui auront faussé ses intentions ?), je préfère montrer la chrétienté que m'*inspire* le SdA (comme un grand :) sans l'aide de l'auteur (malgré lui)), et ainsi peut-être découvrir la foi de mon auteur (et la mienne).
Jérôme
* Notez qu'il l'a dit à son ami Robert Murray, pas à nous. A nous, il a écrit Faërie (on Fairy stories) ; lisez Faërie :) c'est encore mieux !
** Enoncé : "Mes amis Bush et Blair sont des chrétiens fervents" (si, si : prières, messes etc... la totale). Pourtant, je ne sais pas si c'est à cause de la parabole de l'ivraie - sans doute suis-je naïf d'y trouver une contradiction majeure avec la guerre préventive -, ou de l'exigence de vérité - je n'ai vu nulle part dans l'Evangile qu'elle pouvait souffrir de la confection de fausses preuves même dans le but de convaincre ses partenaires du mal-fondé de passer outre la parabole précédente -, ou encore à cause de la prophétie selon laquelle « celui qui veut sauver sa vie la perdra ; celui qui la perdra à cause de moi la gagnera » - à nouveau je fais partie des simples d'esprit qui trouvent là une contradiction totale avec la mise en avant du principe selon lequel les intérêts et sécurité de la nation américaine passent avant tout le reste -, quelque chose me dit que cet énoncé ne me permettra pas d'éclairer les politiques et actions de mes amis Bush et Blair ...
*** Il y a entre l'auteur et son oeuvre comme le rapport du parent avec son enfant : celui-ci doit être laissé libre de l'intention de ses parents ... (cf. le post de TB ;))
**** Cf. Etude et Créance Secondaire
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Pardon pour 'l'angélisme', donc. Il est évident que de multiples lectures sont possibles et pertinentes - y compris celle qui met en évidence les défauts, les bassesses, les erreurs, pourquoi pas même le ridicule de tous les personnages. A chacun de décider ce qu'il préfère voir et partager, non ? ;-)
Ylem.
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Yyr,
je crois que nos positions ne sont pas forcément incompatibles. Je suis d'accord pour dire que le plus important est la lecture à postériori.
De ce point de vue le SdA a été un véritable choc pour moi. Alors que j'avais commencé à lire ce livre un peu par hasard, il y a 14 ans, je me souviens tres bien m'être dit en le terminant "pour avoir écrit un tel livre à coup sur cet auteur était un catholique pratiquant". Alors que je ne connaisais rien de sa vie celà c'est imposé à moi comme une évidence. C'est ensuite pour vérifier cette hypothése que je me suis intéressé à sa biographie.
Je suis donc parfaitement d'accord pour reconnaitre que c'est ce message induit qui est le plus important. Pour autant connaissant maintenant la volonté réelle de l'auteur je continue a penser qu'il n'y a rien de "spécieux" à ensuite rechercher avec respect et amour pour son texte les éléments cachés qu'il y a volontairement mis. *
Celà détruit-il la féérie? Peut-être... Mais pour moi il suffit de me mettre a lire quelques pages pour m'y replonger entièrement et oublier mes réflections trop intellectuelles.
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Yyr,
je répondrais moi aussi à ton message, pour te dire en tout et pour tout que je me place pour fonder mes dires, sur un plan aussi psychologique que religieux: pouvait-il se détacher même consciemment des références au catholicisme: en clair, Tolkien a écrit un livre catholique, quel mal ensuite à rechercher dans les Saintes Ecritures pour voir d'où l'esprit de Tolkien a tiré la substance (et oui Tolkien est un sous-créateur, il ne crée pas dans le sens où il est obligé de construire à partir d'une matière préexsitante - hé oui moi aussi j'ai lu Faërie - j'ajouterais que Tolkien dit que l'Evangile porte en elle quelque chose qui embrasse toute l'essence du conte de fée, donc même le Seigneur des Anneaux tire sa substance de cette essence...au même titre que tous les autres contes de fées et les mythologies)
Vois tu je ne pense même pas que rechercher des références a priori (j'ai découvert que Tolkien était catho seulement après avoir lu le SDA comme jean d'ailleurs) tue la féérie, au contraire ça la renforce, ça lui donne un peu plus de piment (non qu'il n'y en ait pas déjà assez), mais pour un catholique qui a une bonne formation et qui relit le SDA ou le Silmarillion cette une absolue délectation que de voir certains lien possibles.
Je ne lis pas les oeuvres de Tolkien comme un carnassier, je les lis et au hasard d'une page ce qu'on pourrait appeler mon "moteur de recherche" se met en route, et tiens peut-être que..., et si... C'est comme ça que je fonctionne pas autrement, je ne m'en vais pas à la chasse aux références (sauf si par hasard j'avais à écrire sur ce sujet un travail particulier).
Pour te montrer un exemple amusant, une petite anecdote pour te prouver que je lis le SDA sans a priori réels et que je sais ne pas tuer la féérie; pas plus tard que tout à l'heure (lol), je lisais le chapitre de la Lothlorien dans le RER, mon esprit était tellement plongé dans ce monde, comme ça arrive à tous en lisant ce livre je pense, qu'en sortant dans la rue, je trouvais cette ville terne, les maison sans couleurs, les arbres tristes, avec une espèce de nostalgie d'un monde perdu, "Lothlorien the fair"...et pourtant dans ce texte il y a un appel chrétien: vois tu on pourrais très bien dire que la Lothlorien et le retour sur l'Anduin montrent deux aspects de la vie chrétienne: la contemplation (lorien) et l'action ( retour sur la Terre du Milieu sauvage et dangereuse). Et pourtant je suis certain que Tolkien n'a pas du tout pensé à ça en l'écrivant, mais c'est sans doute un aspect de son esprit qui fait que sans même y penser il écrit des choses capables de ravir tous les coeurs et encore plus ceux des coeurs catholiques (bon soyons oecuméniques et disons "chrétiens").
Voilà j'espère que c'est bien expliqué. Pour comprendre cela je crois qu'il faudrait être dans la peau de quelqu'un qui a une bonne connaissance des Ecritures et l'enthousiasme de Tolkien mixé.
Voilà voilà...
jb
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Voyons...permettez moi d'intervenir d'une manière toute simple:
Si Tolkien a indiqué qu'il avait fait dès le début une oeuvre catholique, d'abord inconsciemment et ensuite volontairement, est ce qu'elle est pour autant réduite à cela seulement?
Il me paraît assez "normal" qu'un écrivain laisse transparaître dans son oeuvre son "arrière plan culturel" (disons spirituel, en l'occurrence). Et qu'ensuite il choisisse volontairement de laisser s'exprimer ce qui lui tient à coeur (sa spiritualité donc).
Cependant, il écrit un conte, une " faerie", et il me semble que c'est plus large qu'un message religieux. Ne serait ce qu'à cause de la liberté qu'il a envie de donner au lecteur (cf "Faeries" justement, à moins que je n'aie rien compris)
Je ne sais si des pays de culture non chrétienne ont manifesté pour Tolkien un engouement aussi grand qu'en europe, mais ça ne me semblerait pas impossible: Après tout, le Bien, le Mal, l'amitié, le courage, la compassion, ce n'est pas réservé à la Chrétienté.
Est ce que l'oeuvre de Tolkien n'est pas plus ...universelle? (Et ne me dites pas que la religion chrétienne est universelle, hein, ce serait une pirouette ;o) )
Si oui, je ne vois aucun inconvénient à des lectures catholiques, au contraire, c'est enrichissant pour tout le monde.
Mais il ne faut pas oublier que le lecteur athée aussi se laisse envoûter par l'enchantement, et ça me paraît (encore plus ?) important.
Romaine (lectrice athée, mais ça, vous l'aurez compris...;o) )
NB: Pardon, on n'est plus du tout dans le sujet de Frodon à Orodruin, désolée...
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L'incapacité de Frodon n'est pas un réel échec pour lui il me semble qu'il ne revient pas dans la suite de ses aventures sur se fait. Ceci n'est encore moins une trahison, il a juste perdu son combat contre lui même. Parrallèlement à la bible il est vrai que certaine parabole affirme que si tu pêche du regard crêve toi un oeil (biensur j'extrapole à fond, que l'on me pardonne), l'anneau l'a trahi son doigt a été coupé... biensur cette mythologie a des aspects "catho" pas sa philosophie mais je pense qu'il ne faut y voir qu'une influence culturelle comme dans toute histoire.Qu'en est il de la race des hommes, ne croyez vous pas que si Tolkien avait voulu implicitement manifester la philosophie du christianisme, il l'aurait montré chez les homme??
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Bonjour Julien le Sage,
Bienvenue sur ce forum et je suis contente d'être la première à t'accueillir .
Nous souhaitons te lire souvent, comme dit notre Estimé Webmestre !
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Romaine, rassure-toi, je ne pense pas que quiconque veuille "réduire" le SDA à une oeuvre spécifiquement catholique. je pense qu'un sujet comme celui évoqué ici ne pouvait que mener à une réflexion dans ce sens, la notion de "faute morale" menant "naturellement" à celle de péché. ceci dit, comme je l'ai dit plus haut, je pense qu'elle a un sens, indépendamment d'une transcendance - transcendance dont, si je ne me trompe pas, Frodo en tant que hobbit n'a qu'une conscience vague, Eru n'étant pas le Dieu chrétien dans son rapport intime et personnel avec chaque croyant (théologiens et érudits de la religion en TdM peuvent m'éclairer, siouplait).
de plus, comme je l'ai déjà dit, être soi-même de conviction chrétienne, bouddhiste ou athée n'empêche pas de concevoir les conceptions personnelles que l'auteur met dans son oeuvre, comme de s'interroger, comme tu le dis, sur la réception intime que nous faisons de tel ou tel épisode, sentiment vécu par un personnage etc. D'où ma surprise régulière devant le besoin, quand les sujets évoquent ces enjeux religieux, de préciser "moi lecteur chrétien", "moi lecteur athée", cela me semble limitatif de vos propres jugements - qui pourtant attestent tout aussi régulièrement d'une réflexion nuancée et ouverte au débat.
L'éclairage chrétien sur la notion de faute peut influer sur notre vision de celle (ou non) de Frodo, sans pour autant être catégoriquement réducteur, excluant toute prise de position du lecteur, quelles que soient ses propres convictions. ou alors, on renonce à penser, ce qui est caractéristique du propos sectaire. ouf, nous en sommes très loin sur JRRVF, il n'y a qu'à voir la richesse de ce sujet.
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Quelques éléments de référence, SVP :
Plusieurs d’entre vous parlent de lecture «carnassière» … Je me souviens avoir lu des discussions sur cette idée dans un fuseau, mais lequel ?
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>> Lothiriel : D'où ma surprise régulière devant le besoin, quand les sujets évoquent ces enjeux religieux, de préciser "moi lecteur chrétien", "moi lecteur athée",
Une remarque qui fait plaisir à lire et une surprise partagée, avec un soupçon de tristesse et de lassitude.
>>Sylvae : Quelques éléments de référence, SVP
C'est dans le post d'Yyr du 02-05-2003 13:21 dans le fuseau Dans quelle mesure interpréter Tolkien que tu trouveras la première apparition du mot sur le forum.
Sur une proposition de ma part (Grand carnassier devant Eru mais néanmoins omnivore ;-)), Carnassiers (qui possède maintenant grâce à Yyr sa traduction elfique : *axondili
) "se dit ici de ceux qui se livrent, parfois au-delà de toute morale faërique ;), à la dissection des contes, et font ressortir l'os du boeuf de la soupe, pour reprendre l'image employée par JRR Tolkien dans On Fairy Stories.
De manière plus imagée, un carnassier aime, de temps en temps, à "ronger quelques os externistes"
...Par exemple chercher les sources hypothétique d'un texte, comme on cherche à savoir d'où viennent les pierres qui ont servi à bâtir une tour, sans se soucier de la notion d'Enchantement...enfin, c'est ce que pensent les disciples de la "morale faërique" selon Tolkien qui prone l'Enchantement par la seule Loi de la Créance Secondaire et donc impose certains interdits alimentaires ;-))
Pour ma part, j'aurais tendance à dire "tout m'est permis, mais tout n'est pas utile", sachant que si je respecte le texte, je ne serai pas de ceux qui détruisent mais bien de ceux qui construisent.
Mais poursuivre cette discussion mène aux deux fuseaux d'Etude et Créance Secondaire.
Sosryko
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julien le sage >
Bienvenue parmi nous comme te l'as déjà souhaité Sylvae :-)
Lorsque tu parles de "manifester la philosophie du christianisme" en la montrant chez les hommes, j'ai un peu de mal à te suivre. Bien entendu, les hommes (ou hobbits, ou elfes) de la Terre du Milieu ne peuvent être chrétiens (les histoires qui nous sont contées sont censées se dérouler avant l'ère chrétienne de notre monde). De même, le monde secondaire (comme notre monde primaire) est peuplé de personnes loin d'être parfaites : "nombre d'habitants [sont] bons, mauvais ou les deux à la fois comme il en va d'ordinaire" (Smith of Wootton Major) sans que cela n'empêche le lecteur de pouvoir s'interroger sur le fait que Frodo peut avoir commis une faute à un moment donné (au sens chrétien) ou exprimé de la pitié pour Gollum à un autre. Celui qui lit avec un regard chrétien pourra aussi se demander quel est le regard d'Eru/Dieu vis à vis des actions des hommes.
Toutefois, comme le souligne Yyr, la lecture chrétienne de l'oeuvre peut être faite seulement a posteriori (et non a priori). Tolkien n'a ainsi jamais dans le LotR manifesté explicitement la philosophie du christianisme. Et c'est bien volontaire :-) De là découle la différence entre allégorie et applicabilité. Ainsi, romaine souligne très justement que le lecteur athée, ou bouddhiste, etc. pourra bien évidemment lui aussi participer à l'Enchantement du monde secondaire, ce qui serait moins évident si l'oeuvre nécessitait un regard chrétien pour être appréciée. Toutefois, il est également vrai qu'un lecteur chrétien pourra trouver dans un conte réussi "un reflet ou un écho lointain de l'evangelium dans le monde réel" (Fäerie, p. 201), même si cela laissera probablement de marbre le lecteur athée. Il est heureux que chacun puisse lire un bon conte suivant ses propres convictions :-). Tolkien, très imprégné de la religion catholique (qui représentait sans doute pour lui bien davantage qu'une simple influence culturelle) pose pour sa part un regard chrétien sur son oeuvre comme en témoignent les Letters (applicabilité). Mais cette oeuvre n'a pas été conçue comme une allégorie ou une parabole illustrant le message chrétien. Tout dépend de la foi de chacun.
Laurent
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Re MJ du Gondor:
" Le manichéisme de Tolkien a déjà maintes fois été évoqué... "
En fait, je faisais plutôt allusion, non pas à un possible manichéisme de Toto, mais à celui de nombre de ses lecteurs ( dans la vision qu' ils avaient des personnages, quoi ), et, tout ersatz d' humour mis à part ( Aïe, voilà qui risque de raccourcir singulièrement mon ( trop ) long plaidoyer ! ), j' ai tenté, dans un lecture inter...Euh ( -niste, me souffle Sosryko ), interniste, donc, de justifier ma réponse à la question de Semprini: que pensais-je d' un éventuel echec de Frodo, face à l' ultime tentation !
Mais peut-être n' ai-je pas bien compris le sens de ton intervention...Et tu pourrais me la préciser ?! ( Par mail, éventuellement, pour éviter l' ennui de ceux qui t' auraient parfaitement compris ! )
Re Ylem:
" ...Il est évident que de multiples lectures sont possibles et pertinentes - y compris celle qui met en évidence les défauts, les bassesses, les erreurs, pourquoi pas même le ridicule de tous les personnages. A chacun de décider ce qu'il préfère voir et partager, non ? "
Houlà...Mais ne serait-ce pas un joli caillou dans mon jardin ( d' Eden ), ça ?! Loin de moi l' idée de mettre en évidence une quelconque " bassesse ", voire le ridicule de qui que ce soit, fût-il personnage de roman...Ou de forum ! Je ne faisais qu' étayer, par de simples exemples, ce qui me semblait être l' échec de Frodo, et son...Euh...Evidente inéluctabilité ! Je suis désolé que mon goût avéré pour l' abjection est, de ce fait, terni quelque peu, pour certains, l' image qu' ils avaient du pays de Oui-Oui...Euh, je voulais dire, de la TdM !
Dommage, je les aimais pourtant bien, moi, mes Sacquet/Dalton...! :[
TB
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Re Yyr:
Quant à vous, n' ayez crainte, je me mets, dès toute ma honte bue, au travail sur un post qui mêlera, tout à la fois: le Mal, le Bien, la Providence, athéisme et religion, visions internistes et externistes...Le tout dans un style qui renverra Toto lui-même au rang de pauvre balbutiateur intraduisible !
C' est promis...! :)
TB
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Sosryko > Sur une proposition de ma part (Grand carnassier devant Eru mais néanmoins omnivore ;-)), Carnassiers (qui possède maintenant grâce à Yyr sa traduction elfique : *axondili) "se dit ici de ceux qui se livrent, parfois au-delà de toute morale faërique ;), à la dissection des contes, et font ressortir l'os du boeuf de la soupe, pour reprendre l'image employée par JRR Tolkien dans On Fairy Stories. De manière plus imagée, un carnassier aime, de temps en temps, à "ronger quelques os externistes" ... Par exemple chercher les sources hypothétique d'un texte, comme on cherche à savoir d'où viennent les pierres qui ont servi à bâtir une tour, sans se soucier de la notion d'Enchantement... enfin, c'est ce que pensent les disciples de la "morale faërique" selon Tolkien qui prone l'Enchantement par la seule Loi de la Créance Secondaire et donc impose certains interdits alimentaires ;-))
Cher Sosryko, ta manière imagée de définir un *axondil (axo q. 'os' + (n)dil q. 'qui aime (normalement associé à l'idée d'étude)') me plaît, bien plus que l'esquisse rapide de définition que j'avais proposée, trop partiale :) et non aboutie ... nous en reparlerons, et j'attendrai ton regard critique quand je rédigerai mon Shibboleth un jour :)
Dans cette approche, étrange au coeur des étoilés, tu fais bien par ailleurs de dire la différence entre étudier une pierre et abattre la tour (= allégorisation) (l'ennui c'est que tout le monde se réclamera bien sûr des premiers ... rien de nouveau sous la Soleil) ...
Jean >
Merci pour ton mot :) - tout à fait dans la ligne de la discussion d'Etude et Créance Secondaire - il montre que nous sommes d'accord sur la problématique, même si nous n'y apporterons pas toujours la même réponse.
Cynewulf >
Je n'ai pas le temps de me fâcher, nom d'un magicien, mais si tu ne réponds pas à mon argumentation, je saurai quel nom donner à mon ami Nain :)
Romaine > permettez moi d'intervenir d'une manière toute simple
Dis tout de suite que nous coupons les cheveux en quatre ! hi ! hi ! hi ! :) :) :)
Finrod >
Tiens bon ! Ne lâche rien mon ami ! :) :) :)
A dans 10 jours à tous ; je prends des vacances bien méritées, après tant d'oppression carnassière :), allant méditer le très beau Guérison et conte proposé par Sosryko ...
Yyr
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TB : En dépit de ton affreux élitisme affiché (je manque peut-être d'humour) tu sais très bien que je ne suis que trop d'accord avec toi mais je te reprochais de généraliser trop facilement cette vision réductrice dont font preuve certains lecteurs de Tolkien en ne reconnaissant pas le droit à l'erreur à leurs héros favoris; elle ne pouvait en aucun cas te concerner; comme toi je le présume, ma préférence va aux héros imparfaits peut-être pour le seul plaisir d'exercer mon indulgence ou de me reconnaître dans leurs faiblesses.
Et puis on ne peut mettre en évidence que ce qui existe déjà.Mais je ne voudrais pas accabler Ylem qui a vraisemblablement cédé à un moment d'agacement !
Par ailleurs je suis certaine que l'éclairage que tu nous promets me ravira, mais en me gardant bien de tout désir d'anticipation, je voudrais rendre hommage à Romaine pour la clarté de son message auquel j'adhère totalement. J'ajoute qu'il me parait illusoire de vouloir concilier l'inconciliable. A un certain point, la discussion devrait s'arrêter et notre bon sens nous dicter de mettre un terme au debat sans acrimonie ni amertume car c'est alors que nous mêlons dangereusement fiction et réalité.(ça c'est pour moi et pour la faute de Frodon ! pour le Bien, le mal la providence etc... je sais bien que nous ne cesserons jamais d'en discuter et c'est heureux !!)
Mj
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A Lothiriel: Sur la signature, j'ai eu envie de me définir, en souriant tout de même ;o). Ce qui peut limiter mon jugement, c'est parfois une méconnaissance de la sphère religieuse, non une opposition matérialisée par une signature.
Sur le fond, je me retrouve assez bien dans ton post et dans celui de Finrod. Je suis donc rassurée...
A Yyr: "Dis tout de suite que nous coupons les cheveux en quatre ! hi ! hi ! hi ! :) :) :)"
Alors là, tu m'as bien eue! ;o) Mais non, tu sais très bien que ce n'est pas ce que je voulais dire ;o))))
A MJ: Merci, je craignais justement de n'avoir pas été assez compréhensible :o)
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A tous ceux qui ont accé leur réflexion sur le christianisme chez Tolkien je me permet de leur donner rendez vous sur le fuseau "Jusqu'ou interpréter Tolkien" qui sera sans doute plus approprié, il serait en effet pas mal de reprendre la discussion sur la question première, maintenant rien ne nous empeche de faire des liens entre les deux fuseaux.
Au moins comme ça nous aurions toute lattitude pour discuter, et les gens qui viendront sur le fuseau ne se retrouverons pas perdu entre une dizaine de personnes s'arrachant un morceau d'os...
qu'en pensez vous....
Yyr, laisse moi penser à une réflexion approfondie avant de répondre à ton argumentation, mes vacances nouvelles devraient m'en laisser le temps...allez hop
jb
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Hé bien hé bien,
peu de monde aujourd'hui pour disserter de frodo à Orodruin...le nombre de 100 serait il une barre que les "forumistes" distingués sont heureux de franchir sans qu'il soit question d'aller plus loin...je titille, je titille pour attirer les réactions...
Bon pour ma part je redis en la reformulant ma position sur l'attitude de Frodo au mont Orodruin: il y a une "faute objective" du fait de passer l'Anneau au doigt, faute dont la responsabilité est nulle du fait de l'influence qu'a l'Anneau sur Frodo depuis le début de sa queste...le point qui est toujours litigieux est de savoir si Frodo était encore libre quand il met l'Anneau: franchement je ne crois pas ce qui explique qu'il n'y ait pas de responsabilité (bien que je pense qu'il y ait une faute objective)...pourtant une chose est certaine: personne ne sait peut être pas meme Tolkien ne sait ce qu'il y a dans la tête de Frodo quand il met l'Anneau...toutes nos réflexions tenant à la liberté de Frodo sont donc limitées en ce que nous ne savons pas quel est l'état d'esprit exact (même avec les réflexions de Frodo: ce ne sont que des remarques "x" à un moment "y" qui ne reflettent pas forcément l'état d'esprit de Frodo au moment critique...
Bon avec tout cela viennent les réflexions sur l'influence de Gollum et de la Providence etc etc...
Vivement qu'on reparle de ce sujet et qu'on dépasse à nouveau la barre des cent...
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Pour dépasser la barre des cents et malgré ma décision annoncée de ne plus parler de la faute de Frodon:
" l'inconvénient de ta question, c'est qu'elle parle d'un Frodon qui n'existe pas! Celui dont nous parlions (Frodo si tu veux) est bien né de l'esprit de Tolkien. En tant que créateur il devait savoir ce qu'il lui mettait dans la tête.
Et pourtant , ne dit-on pas aussi, qu'un auteur peut perdre la maitrise de son héros, tout comme un créateur Eru, par exemple, ne saurait imposer un choix à ses créatures.
Dans ce cas le héros appartient au lecteur.
J'ai bien envie d'effacer ce message !!
Mj
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Le fuseau ouvert par Dame Lambertine m’a fait pensé à (et donné envie de donner) la suite que j’avais prévue de mon côté il y a 6 ans : le fichier que je viens de reprendre est daté de 2003 :). Je m’étais abstenu à l’époque à la demande de Cathy, qui voulait que nous publiions au même rythme parce qu’elle avançait sur quelque chose d’analogue. Depuis le temps, j’estime qu’il y a prescription :) D’ailleurs, David, si tu passes par ici, non seulement tu peux saluer ta maman pour nous, et me dénoncer, mais aussi lui dire qu’elle nous manque (et toi aussi :)).
Or donc, nous en étions arrêtés à la question de savoir si Frodon était libre au moment de passer l’Anneau au doigt au sommet des Crevasses du Destin : quelle part de liberté lui restait-il à ce moment-là ? le mal dans cet acte était-il entièrement dû à l’Anneau (et à son œuvre maléfique en amont) ? Frodon avait-il encore une responsabilité morale à ce moment ?
Je publie ci-après les billets que j’avais constitués à l’époque, à quelques menues corrections près. Ce serait quand même dommage de traduire Marring par Blessure :)
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De Cul-de-Sac au Mont Destin : le poids de l’Anneau, le pouvoir du Mal, et la liberté de Frodon
Un pouvoir maléfique hors du commun, de fascination, de tentation, et de domination. Un poids énorme et accablant, tant pour le corps que l’esprit. Une souffrance et une torture sans fin pour celui qui refuse de lui céder. Ainsi était le Grand Anneau, telle une concentration du Morgoth disséminé habituellement dans toute l’Arda. Voici, bien plus terrible que tous les dangers affrontés sur la route, le mal auquel Frodon fut confronté, un mal morgothien, diabolique dirions-nous dans notre Monde.
Cet Anneau privait-il à la fin son porteur de toute volonté et de toute liberté de lui résister ?
Ce qui est tenu pour sûr est la nature maléfique de l'Anneau. Qu’est-ce que le Mal ? et la tentation ? Les derniers volumes de HOME sont parfois très précis sur cette articulation entre la tentation d'une part, et la réponse à cette tentation, la participation de l'Homme et sa liberté, d'autre part. [Cf. dans la 3è Feuille de la Compagnie Le Marrissement d’Arda : fil et traduction de la Catastrophe du Conte, voir en particulier la partie II.C. Entre endurer et céder : la singularité des sémantiques] Plusieurs textes de tradition elfique abordent le mystère du mal et du Marrissement d'Arda. L'Ósanwe-kenta, l'essai par le Sage Pengolodh de Gondolin sur l'échange de pensée (télépathique) m'apparaît révélateur à bien des égards quant au Mal en Arda, et, s'il ne traite pas exactement de notre sujet, il s'applique néanmoins il me semble, puisqu'il aborde le cas où l'on cherche à forcer l'esprit d'une personne. En Arda, nous est-il dit, rien ne peut forcer l'esprit d'un Incarné ...
Bien qu'en "Arda Immarrie" l'ouverture (de l'esprit) est l'état normal, chaque esprit a, depuis sa conception en tant qu'individu, le droit de se fermer ; et il a le pouvoir absolu de rendre cette fermeture effective par la volonté. Rien ne peut franchir la barrière du Refus (Aucun esprit ne peut, néanmoins, se fermer à Eru, ni à Son inspection ou à Son message. Le dernier peut être ignoré, mais l'esprit ne peut prétendre ne l'avoir pas reçu)
Ósanwe-kenta, Vinyar Tengwar n°39 (traducion libre)
... mais comment expliquer, pourra-t-on lui répondre, l'emprise totale de Melkor sur certains esprits ? Pengolodh explique qu'il s'agit d'une perception erronée de ce qui se produit en réalité (cf. à ce titre la brillante hypothèse de notre ami Moraldandil : Túrin maudit : une illusion d'optique ?) : Melkor, qui est pourtant le pouvoir le plus grand en Arda, n'a pas ce pouvoir. Mais, par la torture, par le tourment imposé à un Incarné, sur son corps, sur son esprit, il peut oppresser sa volonté jusqu'à ce que cède sa victime :
Ainsi par tromperie, par mensonges, par le tourment du corps et de l'esprit, par la menace du tourment infligé aux bien aimés, ou par la simple terreur de sa présence, Melkor a toujours cherché à forcer l'Incarné qui tombait en son pouvoir, ou qui venait à sa portée, à parler et dire tout ce qu'il savait.
Ibid.
La personne est ainsi comme une maison fermée, dont elle seule peut ouvrir (librement) la porte. Melkor lui-même ne peut forcer cette porte de l'extérieur ; il lui faut trouver (et il y parvient en général) le moyen d'exercer une pression sur sa victime, de sorte que cette pression soit jugée insupportable par elle et qu'elle lui cède et lui ouvre de l'intérieur.
Il me semble que l'Anneau, d'un pouvoir de Mal hors du commun, procède bien ainsi, par une pression "insoutenable" sur le *corps* et *l'esprit*, jusqu'à ce que la *personne* cède et ouvre d'elle-même la porte. C'est bien elle qui bien que torturée « ouvre la porte ». Le porteur est condamné à céder ou à être brisé. Cf. la lettre 181 déjà citée par rapport à la situation de Frodon :
Des situations « sacrificielles », c’est le nom que je leur donnerai : i.e. des cas où le « bien » du monde dépend du comportement d’un individu dans des circonstances qui exigent de lui souffrance et endurance bien au-delà de ce qui est normal ; et même, ce qui peut arriver (ou semble arriver, en termes humains), exigent une force du corps et de l’esprit qu’il ne possède pas : il est, en un sens, voué à l’échec, voué à [1] succomber à la tentation ou [2] à être brisé par la pression exercée contre sa « volonté » : c’est-à-dire contre le choix qu’il pourrait ou voudrait faire s’il était non entravé et non sous la contrainte.
Lettres, p. 331
Dans le cas [2] la maison est brisée : tout vole en éclat et il ne reste personne pour participer librement au mal (ce qui se traduit soit par la mort du corps soit par la folie définitive de l'esprit) : le Tentateur en allant jusqu’à briser sa victime échoue. Dans le cas [1] en revanche, il me paraît juste de considérer que, même "à bout", même aux dernières extrémités, céder à la tentation, ouvrir la porte est un acte "libre", dans le sens où le mal n'a pas le pouvoir de faire ouvrir la porte de l'extérieur. Il était donc devenu "impossible" de résister ... Mais, lorsqu'il a passé l'Anneau au doigt, Frodon a « ouvert sa porte ». Vaincu dans un combat inégal, il a vidé "toutes" ses forces physiques et mentales ... sauf celle de passer encore l'Anneau au doigt ! Son corps n'a pas été brisé, ni son esprit ; il a bien été jusqu'à la limite (et sans doute a-t-il repoussé même ses limites tout au long de sa quête), mais à la fin, à la toute dernière extrémité posée entre être brisé et céder, il a cédé. Il lui était visiblement impossible de résister plus longtemps à la pression exercée par l'Anneau, mais si j’en crois Pengolodh il restait libre de ne pas ouvrir sa porte. Il m’apparaît évident que s'il s'en était gardé, il aurait été véritablement brisé, son esprit balayé et volé en éclat. Frodon (ou du moins sa raison) serait mort (et Sam aurait récupéré une coquille vide), mais ainsi l'Anneau aurait perdu ; Frodon serait allé au-delà du possible, en se défaisant de sa vie. Dans notre monde (ou sa vision) chrétien(ne), la différence est bien là avec le Christ, qui n'avait pas plus de possibilité de résister au Mal que le moindre des Hommes, ayant assumé l'entière condition humaine, mais qui n'a jamais cédé, et, à la fin, il est allé jusqu'à être brisé.*
* S'il n'a jamais cédé, c'est aussi parce qu'à l'intérieur, le Christ n’a donné aucune prise à cette pression extérieure. La Sainteté n'est pas seulement un état du moment ; elle est aussi un chemin de vie, chemin qui ne donne aucune prise au Mal : « Désormais, je ne parlerai plus beaucoup avec vous, car le prince du monde va venir. Certes, il n'y a rien en moi qui puisse lui donner prise, mais il faut que le monde sache que j'aime mon Père, et que je fais tout ce que mon Père m'a commandé » (Jean 14, 30-31).
Ceci pour être précis quant à la question de la liberté de Frodon au dernier moment. Mais certainement pas pour le juger : qu’aurais-je parcouru de son chemin à sa place ? Comme je le lis dans les Lettres, la Miséricorde dont Frodon a fait preuve l’a emporté (et de combien !) par anticipation sur son échec, et cela est décisif.
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Álamë tulya úsahtíenna, mal ámë etelehta ulcullo
q. Ne nous conduis pas à la tentation, mais délivre-nous du mal (Vinyar Tengwar 43)
Que parcouré-je tout simplement aujourd’hui à sa place ?
Peut-être pouvons-nous nous risquer à une analogie, bien qu’imparfaite, avec toutes nos situations de plus ou moins grande souffrance psychique, à laquelle chacun peut être confronté (et auxquelles Tolkien faisait peut-être entre autre allusion dans la lettre 181), qui poussent leurs victimes, au final à céder, qui à telle violence, qui à telle assuétude, etc… des situations de grande souffrance qui naissent dans une faiblesse (toute humaine), quand le mal s’y engouffre et élargit cette faiblesse, un échec entraînant le suivant, y ajoutant parfois un sentiment de culpabilité, et un poids qui va croissant, chaque chute ajoutant un poids supplémentaire d’assuétude pour le corps et de culpabilité pour l’esprit, qui diminue les forces pour résister à la prochaine épreuve.
Cette analogie ne supporte pas la comparaison dans les moindres détails, mais elle renvoie peut-être à une manière de comprendre le poids de l’Anneau, nous qui ne l’avons pas porté. Nombreux peut-être sont ceux en notre Monde qui ont un « Anneau ». Contrairement au professeur — et ce sera bien là l'une de mes rares et minces divergences avec Tolkien :) / à moins que nous exprimions la même idée différemment ? — je ne crois pas que nous demandions à être délivré d'une tentation « au-delà de notre pouvoir » (cf. lettre 191), mais d'un Mal peut-être plus cruel d’une certaine manière, qui fait le siège de notre volonté jusqu'à que, "à bout", nous cédions et participions au mal ; voici à mon avis la Tentation dont on supplie d'être délivré, qui n'est pas au-delà de ses forces — et reste selon moi plus cohérent avec Saint Paul (cf. à nouveau lettre 191) — mais, il est vrai, diffère d'autres tentations ... elle est de celles qui promettent d'être délivré de la souffrance si on lui cède. Ces chutes occasionnent alors en retour une souffrance spirituelle énorme, parce qu'ayant participé volontairement à un mal qu'on refusait de "toutes" ses forces :|
L'Anneau était porteur entre autre de ce Mal des plus cruels : celui de prendre possession de son porteur à son escient.
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Du Mont Destin à Cul-de-Sac : le poids de la culpabilité, la blessure de l’Anneau
‘Hélas ! il y a des blessures que l’on ne peut totalement soigner’, dit Gandalf.
SdA, livre VI, chap. 7 = Lettres, p. 460
Dans ces blessures, il y a celles, physiques et psychiques, et visibles extérieurement, qui marquent Frodon après sa quête. Ce sont celles laissées par le mal de l’Anneau, à cause de la pression qu’il a exercée sur son corps et son esprit, et de la résistance longtemps victorieuse de Frodon. Il y a aussi celles plus intimes, et plus spirituelles, autant profondes, qui l’ont marqué intérieurement. Ce sont celles laissées par l’Anneau lorsqu’il a réussi à entrer, c-à-d. à faire ouvrir sa porte à Frodon, lorsqu’il a cédé. Les premières sont sa maladie et sa faiblesse. Les secondes sont les sentiments de culpabilité et de regret.
Oui, même vaincu, ce genre de mal peut éventuellement laisser derrière lui, pour peu qu’on lui ait cédé seulement une fois, un poison pour le cœur, qui ne peut être (humainement) soigné : la tentation du regret et de la culpabilité. La lettre 246 est particulièrement précise quant au cas de Frodon :
Il est à mon avis clair, lorsqu'un lecteur attentif y réfléchit, que lorsqu'il entra dans une période difficile et qu'il eut conscience d'avoir été « blessé par poignard, piqûre et dent, et par un long fardeau » (III 268 [p. 1054]), ce n'étaient pas seulement des souvenirs cauchemardesques des horreurs passées qui l'affectaient, mais également des reproches irraisonnés qu'il s'adressait : il se voyait, lui et tout ce qu'il avait fait, comme un échec et un ratage. « Même si j'arrive [en] Comté, elle ne paraîtra plus la même ; car je ne serai pas le même. » C'était en fait une tentation venue des Ténèbres, un dernier éclat d'orgueil : le désir qu'il avait de rentrer en « héros », ne se satisfaisant pas d'être un simple instrument du Bien. Et mêlé avec une autre tentation, plus sombre et toutefois (en un sens) davantage méritée, car quelle que soit la manière dont on peut l'expliquer, il n'avait en fait pas rejeté l'Anneau dans un acte volontaire : il était susceptible de regretter sa destruction, et de toujours le désirer. […]
Lettres, p. 460
Pour reprendre une dialectique chrétienne, ce mal n’est réellement vaincu que lorsqu’on s’abandonne à la Miséricorde de Dieu, rejetant notre orgueil qui refuse nos limites, qui refuse le pardon. Pour rester dans une dialectique ardaenne (mais les deux sont superposables) cet abandon c’est désirer et attendre la Guérison d’Arda, dont des aperçus peuvent être donnés ici-bas (par exemple le Voyage plus tard de Frodon vers l’Ouest)
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« Il a élevé les humbles » (Luc 1, 52)
C’est avec plaisir que j’emprunte ici et rejoins le titre de la dernière partie d’Irène Fernandez : Et si on parlait du Seigneur des Anneaux.
Enfin, il importe de considérer ce qui compte réellement pour nous, le témoignage laissé par Frodon : en affrontant ces tentations, en faisant l'expérience de sa propre faiblesse, tant physique que spirituelle, et de sa chute finale, terriblement limité par sa condition humaine et ayant dû défendre sa liberté coûte que coûte contre l'esclavage du Mal et de l'Anneau, Frodon s'est fait encore plus petit et humble.
Et il a été relevé.
Et il lui a été donné de comprendre les limites et les chutes des autres, et donc de pardonner (à Gollum, à Saruman). S'il s'est fait plus petit encore, après le Mont Destin, il a grandi, par l'expérience de la souffrance et de la compassion, en charité. Le Bien Véritable n'appelle pas de reconnaissance (terrestre), et c'est à ce signe qu'on reconnaît le Bien de Frodon après sa Quête : nous devons justement nous réjouir que son histoire ne fasse pas plus de cas des mérites qui lui reviennent, à la fin [puisque plusieurs s’en plaignaient dans ce fuseau :)].
Car cela montre que ses mérites ne sont pas de ce monde.
Et qu’ils sont donc véritables.
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Ainsi, l'ennoblissement de l'homme cher à Tolkien fait corps avec l'humilité qui refuse toute humiliation de quelque personne que ce soit.
Merci Yyr pour ce partage... à l'écriture toujours élégante et au propos nourrissant : on trouve de belles fleurs odoriférantes et des truffes savoureuses entre les racines des Ents ;-)
-- Au lit Yyr !
-- Et toi aussi Sosryko !
-- Grmpff... ;--)
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Je ne suis pas entièrement d'accord avec cette analyse : Pengolodh rapporte que rien ne peut forcer l'esprit d'un Incarné à s'ouvrir en pensée à un autre : dans Ósanwe-kenta, c'est de télépathie dont il est question. De fait, c'est une situation qui survient à plusieurs reprises dans le SdA, lorsque Frodo sent une impulsion extérieure l'inciter à mettre l'Anneau (et ce dès I:3). Mais dans ces cas-là, il est toujours librement capable de repousser la contrainte extérieure, même lorsque celle-ci vient manifestement directement de Sauron (sur l'Amon Hen).
L'Anneau lui-même agit-il de la sorte ? Plutôt qu'une pure contrainte extérieure (qui pourrait provenir de la part de l'esprit de Sauron enfermée dans l'Anneau), j'aurais tendance à croire que l'Anneau agit à la manière de Saruman : pervertissant les capacités réflexives et cognitive de son porteur (au sujet de Saruman, je renvois à la Lettre nº210, entrée 34). J'en veux pour preuve les rêves de puissance qui se mettent à assaillir Sam dès lors qu'il porte l'Anneau :
Ainsi, plutôt que d'une simple torture, il s'agit bien là d'une tentation, c'est à dire quelque chose qui est déjà intérieur à la personne tentée, et presque indépendant de son objet en tant que tel (les tentations étant manifestement adaptées à la personne tentée, comme en témoigne la vision de jardins gigantesques dans la tentation de Sam).
Et j'aurais pour ma part tendance à rapprocher ce phénomène de tentation d'un autre texte de Tolkien, les « Notes sur Óre » (VT 42), óre étant un terme qu'il conviendrait sans doute de traduire par « conscience, entendement intime ». On y trouve notamment :
[...]
Les Hommes, disaient-ils [les Eldar], possédaient certainement (ou avaient possédé) óre, mais du fait de la « hâte » mentionnée plus haut, ils y prêtaient peu d’attention. Et il existait une raison plus sombre (liée à la « mort » humaine, pensaient les Elfes) : l’óre des Hommes était ouvert aux conseils maléfiques, et s’y fier n’était pas sûr.
[...]
D’où l’expression courante órenya quete nin = « mon cœur me dit » [? appliqué] à certains sentiments profonds (auxquels on devait se fier) disant qu’une certaine [? suite d’actions etc.] devra être [? approuvée] ou [?] adviendra [? ?].
[...]
. Le « désastre » soupçonnaient ainsi les Elfes était une rébellion contre Eru qui prit [la] forme d’une acceptation de Melkor en tant que Dieu . Une des conséquences de ceci fut que la fea était [? emprisonnée] et Melkor avait [entre crochets mais pas supprimé : une revendication sur ceux qui s’étaient rebellés contre lui et avaient cherché la protection d’Eru >] accès à [? ?] óre, qui [? ? ?] mais étaient [? inutiles] et seuls les plus sages des Hommes pouvaient distinguer entre [? ses] encouragements maléfiques et le vrai óre .
Du fait de la première Chute, la nature humaine semble ainsi irrémédiablement altérée, et la faculté de jugement humaine sujette à des « encouragements maléfiques » : on n'est pas très loin d'une définition de la tentation, celle-ci ayant pour caractéristique d'exacerber les penchants de l'individu jusqu'à lui faire perdre conscience des notions de bien et de mal.
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Attention, mon but n'était pas de dire que l'Anneau agit par ósanwë, au moyen d'un esprit, etc... mais de proposer une analogie (qui ne contredit pas au demeurant des "tentations adaptées" à chacun :)). Ce que j'ai fait ici parce que dans la discussion de ce fuseau depuis son commencement l'on peinait me semble-t-il à mettre tous les mêmes mots sur ce qui se passait chez Frodon ou/et sur ce qui constituait un échec ou/et une faute. Mon analogie a plus cette fonction-là que de chercher à systématiser l'Anneau, ce serait gravement réducteur, l'Anneau étant bien plus que ce que j'en ai dit ici ...
Sinon, je vois bien ce que tu veux dire pour la manière de Saruman, mais cela ne m'apparaît pas coller parfaitement. La nature de l'Anneau et son pouvoir ont toujours été associés dans les textes à ceux de Sauron et même de Melkor (lorsque dans Home X, p.400, le pouvoir de Melkor passé dans toute la Terre du Milieu est précisément appelé l'Anneau de Melkor), et renvoient précisément à cette altération dont tu parles et à la tentation et à la corruption faisant tomber dans le mal. C'est exactement ce que tu écris (excellement) ici, j'y souscris entièrement, et je ne crois pas l'avoir contredit :
Mais ça c'est exactement la définition du pouvoir de Melkor, pas exactement celui de Saruman ;).
Merci pour les précisions et critiques utiles et pour les références aux Notes sur Órë particulièrement intéressantes.
Une seule critique de forme :) Notre ouebmaistre dévoué et tout et tout a mis à notre disposition deux commandes différentes : l'une pour citer les intervenants du forum, l'autre pour donner des extraits des livres. La première est la commande 'Citer', la seconde la commande 'Réf.', et cette dernière est à employer sans modération :).
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Je remonte ce fuseau, en lien avec la discussion sur la question du libre arbitre :).
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