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test
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bis
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test de m.e.f. citation :
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Moui, vu d'ici ça m'a l'air bien
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Vu d'ici (IE) aussi c'est pas mal ;-)) mais la marge laissée sur la doite de la citation n'est-elle pas trop importante?
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Effectivement, ça me fait aussi un peu cet effet.
Si Cédric désire le nuancer, il peut modifier dans la feuille de style les attributs width=90% à un peu plus (95% ?) - pour les div citeAuteur et refTexte.
Yyr
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Corrigé, passage de 90 à 95%. Moyennant un rafraichissement de la page, ça devrait être bon.
Cédric.
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Super, merci :-))
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0 « Wherefore, Ælfwine, if thou wilt consider well all that I have said to thee at this time, not only what is plainly expressed, but also what is therein to be discovered by thought, thou wilt now understand that, albeit more wittingly, albeit more slowly, the tongues of the Quendi change in a manner like to the changes of mortal tongues. » [PM/400]
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Benilbo :Oui.
[ ] le problème est qu'on traite d'objets aux facettes multiples, et choisir l'une approche plutôt que l'autre, c'est choisir une projection. Quand je dis "dénaturer" ou "réducteur", il ne s'agit pas de termes péjoratifs, dans le sens où il s'agirait d'un marrissement, d'une altération. Je veux simplement dire qu'on restreint ces langues à une petite partie seulement de leur nature et qu'on passe du coup à côté quelque chose d'important. [ ]
Ardarin, Lambertine, Toko :Cette assertion ne me paraît pas congruente
"les langues inventées de Tolkien sont humaines, car elles sont le fruit de la sous-création d'un humain"
Benilbo :En te lisant, le parallèle me vient immédiatement avec la conception saussurienne du signe linguistique. Déduisons le modèle suivant spécifique au signe faërique : de même que le signe linguistique général est (tient son existence) de par l'association d'un signifiant (matériel - acoustique) et d'un signifié (conceptuel - sémantique), de même le signe faërique est (tient son existence) de par l'association d'un signifiant (matériel - externe) et d'un signifié (conceptuel - interne). Dans les deux cas la matière n'a de pertinence que si elle joue son rôle de communiquer un sens : c'est l'union du signifiant et du signifié qui fait la réalité du signe. Défaire ce lien, pour un conte dissocier « externe » et « interne », a la même conséquence que de dissocier le signifiant d'un signifié de la langue : lorsqu'on le fait, on ne manipule plus la langue ; de même en faërie n'attrape-t-on que du vide. Le lien qui opère entre les deux et qui maintient la réalité du signe faërique a un nom : c'est l'enchantement (et garder ce lien est ce que certains appellent « étoilé » ; tandis que le rompre est « carnassier »). Ainsi, conserver l'enchantement n'est pas seulement une affaire de poésie et de goût (ou plutôt : le goût de la poésie n'est pas « une » fantaisie ...
Le problème sur lequel je veux insister ne porte pas finalement tant que ça sur le caractère humain ou inhumain; pour moi, comme je le répète, les divergences dans ce fuseau s'articulent autour d'un problème de nature. Et le principal mot sur lequel rejeter la faute dans les phrases "ces langues sont humaines" et "ces langues sont inhumaines", ce n'est pas tant "humain" ou "inhumain" mais bien plutôt le verbe "être". C'est quoi, l'être d'un objet à la nature multiple, l'une faërique dans le monde secondaire, l'autre langue inventée, (sous-)création d'un esprit humain dans le monde primaire ? Pour moi, il s'agit des deux à la fois, et choisir un point de vue consisterait nécessairement à éliminer l'autre (puisque chacun possède son système causatif propre incompatible avec l'autre : en se projettant entièrement dans le premier, Tolkien n'existe pas; en se projettant entièrement dans le second, les Elfes n'existent pas).
Imaginons que nous soyons tous en train de regarder une montagne, chacun depuis notre village respectif, à l'heure du coucher de soleil; l'un, placé à contre jour dira : cette montagne est noire. Un autre, le dos au soleil, dira à propos du versant baigné dans la lumière : cette montagne est rouge. Enfin, un dernier, de biais, ébloui par les rayons réfléchis par les cimes enneigées dira : cette montagne est blanche. Nous aurions tous raison et tort à la fois; raison, car ce que nous disons correpond bien à l'état de la montagne telle que nous la voyons; cet état, de notre point de vue exclu tous les autres. Pour celui qui voit la montagne noire, c'est bien toute la montagne qui est noire en cet instant. Mais nous avons tous tort, car une montagne ne peut être à la fois exclusivement noire, blanche ou rouge, sauf si on la considère de tous les points de vue à la fois. Mais cette considération est factuellement impossible : d'aucun ne peut se trouver dans tous les villages à la fois; seule une considération Naturelle, Essentielle permet de prendre en compte l'être multiple de l'objet en question. Ca ressemble furieusement, finalement, à un problème d'incertitude relativiste, non ?![]()
Cette considération Essentielle des langues de Tolkien, qui me tient tant à coeur, j'en garderai avant tout le caractère symbolique; et volontairement, pour l'illustrer, je choisirai un exemple sujet à controverse (on aime ça sur jrrvf !) : le crucifix. D'un point de vue purement matériel, on pourrait dire : "c'est juste une croix" (re-damned!). D'un point de vue purement spirituel, il serait difficile de décrire vraiment la flamme qui passe à travers tant celle-ci est complexe. Néanmoins, l'isolement du caractère matériel (la croix), ou du caractère spirituel (l'idée, la flamme) est une dénaturation du symbole; l'un ou l'autre prix séparément n'est plus le symbole. [ ]
Yyr :Cette assertion non plus ne me paraît pas très congruente
Concernant ta seconde question, ces langues n'ont pas été conçues à partir du latin, ni du finnois ni d'aucune autre langue de notre réalité.
« Beowulf a été utilisé comme carrière de faits et de lubies bien plus assidûment quil na été étudié comme uvre dart. [ ] je me contenterai ici de présenter mon point de vue de manière allégorique. [ ] La fée marraine invitée plus tard pour présider à ses destinées fut Historia. Et elle prit avec elle Philologia, Mythologia, Archeologia, et Laographia. Dexcellentes dames. Mais où était celle d'après qui l'enfant fut nommé ? Poesis à lordinaire était oubliée ; à loccasion on la faisait entrer par la petite porte ; quelques fois on la congédiait sur le pas de la porte. Le Beowulf, dirent-elles, n'est pas vraiment ton affaire, et nest en aucun cas un protégé dont tu pourrais être fière. Il sagit dun document historique. Ce n'est qu'en tant que tel qu'il peut intéresser la culture supérieure daujourdhui. Et cest comme document historique principalement qu'il a été examiné et disséqué. » 1 (merci Bertrand pour le coup de main)L'activité de ces carriers, dit Tolkien, avait produit des faits (~ tautologiques) et des lubies (même pas
« La recherche de lhistorien est, bien sûr, parfaitement légitime, même si elle ne sert en rien la critique en général (car tel nest pas son objet), aussi longtemps quon ne la prend pas pour de la critique. » 2 Cf. : « À vrai dire, la question : Quelle est lorigine de lélément féerique ? nous mène en fin de compte à la même enquête fondamentale ; mais il est dans les contes de fées maints éléments [...] qui peuvent être étudiés sans aborder cette question principale. Pareilles études sont toutefois scientifiques (dintention tout au moins) ; elles font lobjet des recherches de folkloristes ou danthropologues, cest-à-dire de personnes utilisant les histoires pour un objet qui nest pas celui pour lequel elles ont été écrites, comme mine où puiser des témoignages ou des renseignements sur des matières auxquelles ils sintéressent. Ce procédé est parfaitement licite en soi mais lignorance ou la négligence de la nature dune histoire (comme chose racontée dans sa totalité) a souvent mené pareils enquêteurs à détranges jugements. » [F/72]renvoie, très extactement comme l'annonce Ben, un problème de « nature ». Celle-ci, en réalité, est dans l'association des deux faces de l'élément faërique, et non dans la dissociation. Voilà pourquoi Tolkien, plus loin (MC/24), évoque les « ressemblances » entre Beowulf et l'Aeneid et les exploite, Mais il précise bien que ce n'est pas à partir des points de « réminiscences » ou d'« imitation » que l'on peut conclure, ni à partir de la question de savoir « si [l'auteur de Beowulf] a ou non lu Virgile ». Pourquoi sinon parce que l'enchantement - le lien entre matière et sens - est nouveau dans Beowulf ? Des matériaux sont repris et fondus avec d'autres (cf. ce que rappelle Bertrand en tête de ce fuseau, et la référence qu'il donne), et les liens qui opèrent en leur sein opèrent en synchronie les uns avec les autres et avec un nouveau tout.
« J'aimerais encore décrire cette industrie par une autre allégorie. Un homme hérita d'un champ où s'accumulait un tas de vieilles pierres, les restes d'un ancien château. De ces pierres certaines avaient déjà été employées pour construire la maison où il vivait maintenant, non loin de l'ancienne demeure de ses pères. De ce qui restait, il prit de quoi construire une tour. Mais ses amis en arrivant virent tout de suite (sans prendre la peine de monter les marches) que ces pierres avaient déjà servi à une bâtisse plus ancienne. Ils renversèrent donc la tour, non sans peine, pour y chercher des inscriptions et des sculptures cachées, ou pour découvrir de quel endroit les lointains ancêtres de cet homme avaient tiré leurs matériaux. L'un soupçonnant que du charbon gisait en dessous se mit à creuser, et oublia même les pierres. Tous dirent : 'Cette tour est du plus grand intérêt.' Mais ils dirent encore (après l'avoir renversée) : 'Dans quelle état est-elle !' Et même les descendants de l'homme, dont on pensait qu'ils auraient réfléchi à ses intentions, furent surpris à murmurer : 'C'est un si drôle de type ! Pensez qu'il a pris ces vieilles pierres, et ce pour construire une tour qui n'a pas de sens ! Pourquoi n'a-t-il pas restauré l'ancienne demeure ? Il n'a aucun sens des proportions.' Mais du sommet de cette tour l'homme avait pu contempler la mer. » 3Celui qui (ana)lyse tel un carrier ne peut conclure qu'à l'intérieur du cercle dans lequel il se restreint, et ne peut saisir en même temps le sens (« Pensez qu'il a pris ces vieilles pierres, et ce pour construire une tour qui n'a pas de sens ! »). Celui qui étudie en poète, au contraire, sans négliger la matière des pierres ni leurs richesses propres, voit aussitôt que le poète s'en est servi pour bâtir son propre édifice et aller en hauteur. Ce qui n'interdit pas la critique de la tour en tant que tour : celle du texte est bâtie avant toute chose pour être gravie, mais aussi, je le crois, admirée (dans son style, sa structure, sa force, ses envolée ...). Tant que l'on garde le lien entre la matière employée pour sa rédaction, et la vue qu'elle donne à contempler. Ce lien est l'Enchantement : celui qui gravit son sommet contemple la mer, et c'est le sens de cette tour. Mais elle n'est certainement pas faite pour se voir renverser, rompre ce lien, dissocier les pierres de l'édifice. Il fait sens d'étudier le signifiant du signe faërique si c'est en lien avec son signifié ; ce n'est qu'en tant que tour qu'elle fait sens :
« Sans surprise il devrait maintenant se faire sentir le besoin impérieux dune vision, dune décision, dune conviction. Mais il est clair que ce nest que dans la considération de Beowulf comme poème, avec une signification poétique inhérente, quune vision ou conviction pourra être atteinte et solidement tenue. Car il est dans leur nature que les bafouillages de toute recherche historique antiquaire marmonnent dans le dru bois de la conjecture, voletant dun arbre tam-tam à lautre. Nobles animaux dont le marmonnement à loccasion vaut la peine dêtre entendu ; mais bien que leurs yeux enflammés puissent parfois se révéler projecteurs, leur champ de vision est court. » 4Hi ! Hi !
« Néanmoins, des sentiers dune certaine sorte ont été tracés dans le bois. Lentement, dans le déroulement des années, on découvrit lévidence (si souvent la dernière révélation dune étude analytique) : que nous traitons dun poème écrit par un Anglais renouvelant un matériau ancien et en grande partie traditionnel. Alors et enfin, après avoir si longuement interrogé lorigine de ce matériau, et sa nature originale et originaire (des questions qui ne trouvent jamais de réponse définitive), pourrions-nous maintenant aussi encore chercher ce que le poète en a fait ? Si nous nous posons la question, alors il y a encore, peut-être, quelque chose qui manque aux principaux critiques, les maîtres appris et révérés dont nous sommes modestement issus. » 5 Cf. : « De même pour les contes de fées, je trouve quil est plus intéressant et aussi plus difficile en quelque sorte de considérer ce quils sont, ce quils sont devenus pour nous et quelles valeurs ont produit en eux les longs processus alchimiques du temps. » [F/74]Car les conteurs reprennent sans cesse des matériaux triviaux. La belle affaire que de le montrer ! Mais ce qui est riche et de valeur réside dans « ce que le poète en a fait » et plus particulièrement dans ce qu'il en a fait « pour nous » :
« Les contes folkloriques qui existent alors, quand ils sont racontés car le conte folklorique typique, bien entendu, nest quune abstraction de la recherche et nexiste pas contiennent souvent des éléments qui sont minces et triviaux, et même avec peu de vertu, potentiellement ; mais ils contiennent aussi beaucoup de ce qui est plus puissant et qui ne peut être dissocié du mythe, en étant issu ou bien capable dy tourner entre des mains poétiques : cest-à-dire de devenir largement significatif comme un tout, accepté non analysé. La signification dun mythe ne peut pas être aisément épinglée sur le papier par un raisonnement analytique. Mais elle est à son sommet quand elle est produite par un poète qui fait sentir plus quil explicite ce que présage son thème ; qui la produit incarnée dans un monde dhistoire et de géographie, comme la fait notre poète. Son défenseur a donc pour lui un désavantage : à moins de prudence, et de parler en paraboles, il tuera ce quil est en train détudier par vivisection, et il obtiendra une allégorie formelle ou mécanique, et, qui plus est, une allégorie qui ne fonctionnera probablement pas. Car le mythe est vivant immédiatement et dans toutes ses parties, et meurt avant quil ait pu être disséqué. Il est possible, je pense, dêtre mû par le pouvoir dun mythe et néanmoins den mal comprendre la sensation, de lattribuer entièrement à quelque chose dautre qui est aussi présent : lart métrique, le style, ou le talent des mots. » 6Enfin, de même que la Langue, c'est comme un tout que le Conte existe. Il forme un système au sein duquel chaque élément tire sa valeur en fonction de l'ensemble de ce système, et non pas indépendamment. La Langue aussi est comme le Conte : elle est un enchantement perpétuel d'une matière acoustique en sens et formes pour l'esprit (« La lumière ne pourrait-elle donc pas éclabousser ? » nous demande précisément et judicieusement Laegalad en écho à l'essai sur les Contes de Fées (Faërie/77-78)
Toko :... fort discutables
Personnellement, je trouve que les langues inventées de Tolkien (elfiques et autres) sont on ne peut plus humaines dans leur forme (pour ce qui est de l'aspect sémantique, comme les composés évoqués plus haut par Didier, c'est à discuter...). Les langues elfiques ne sont pas si originales pour des langues inventées et employées par des êtres exceptionnels et immortels. Les procédés morphologiques, grammaticaux ou syntaxiques employés dans celles-ci existent bien dans d'autres langues humaines réelles [ ] Je suis donc de l'avis de Lambertine et Ardarin : les langues inventées de Tolkien sont humaines, car elles sont le fruit de la sous-création d'un humain (avec ou sans "flamme divine").
Benilbo :
Au risque de me répéter, j'aimerais quand même revenir sur la conclusion de Toko : "Je suis donc de l'avis de Lambertine et Ardarin : les langues inventées de Tolkien sont humaines, car elles sont le fruit de la sous-création d'un humain (avec ou sans "flamme divine")." [ ] Avec le point de vue que tu adoptes, Toko, dans cette phrase, d'aucun serait bien en peine de prouver le contraire; tes arguments sont très intéressants etfort justes.
« [ ] voyant quils ne meurent pas et que leur mémoire remonte de longs âges loin en arrière, tu ne comprends pas pourquoi tout le peuple des Quendi na pas maintenu, à partir de celle qui fut jadis la leur, une seule et semblable langue dans toutes leurs parentés. » 7En cela, comme en d'autres choses, c'est justement d'une question de « forme » dont il s'agit, car la matière qu'animent les Peuple doués de Parole est la même pour les Eldar que pour les Hommes :
« Immortels, au sein dEä, sont les Eldar, mais étant donné même que, comme les Hommes, ils séjournent dans des formes qui viennent dEä, ils ne sont pas plus immuables que ne le sont les grands arbres, ni dans les formes quils habitent, ni dans les choses quils désirent ou réalisent au moyen de ces formes. Pourquoi donc ne devraient-ils pas changer dans leur parler, qui pour une part est réalisée avec la langue et reçue par loreille ? » 8Tout ce qui prend « forme » en Arda, et a fortiori tout ce qui prend même forme (les Elfes et les Hommes sont physiquement apparentés au point même qu'ils sont interféconds !), est soumis aux mêmes limites et aux mêmes champs des possibles (Une comparaison me vient à l'esprit - j'étais persuadé de l'avoir vue dans le Cours de Linguistique Générale mais je ne parviens pas à en retrouver la trace - : la forme empruntée par une langue peut varier d'un idiome à un autre, mais toujours en deça de certaines limites communes à tous, ces limites étant fonction des limites physiques des parlants (appareil phonatoire / acoustique), de même que les hommes pourront se vêtir différemment d'un pays à un autre, mais ces différences s'inscrivant toutes en deça de certaines limites communes, à cause de la physionomie qu'ils partagent (ayant tous deux bras, etc...)). Il y aura tout de même une nuance de taille : les Elfes tirent souvent partie des plus belles de ces réalisations possibles : leurs langues sont plus belles, plus sonantes et tissés pour le ravissement. Leur lámatyávë - comme celui du poète - n'est pas celui du commun des mortels :
« Mais au caractère changeant dEä, à la lassitude de limmuable, au renouvellement de lunion [de la pensée avec le son] : à ces trois choses, qui nen sont quune, les Eldar eux aussi sont sujets, à leur niveau. En cela pourtant, ils diffèrent des Hommes, en ce quils sont toujours plus conscients des mots quils prononcent. Comme un orfèvre peut demeurer plus que dautres conscient des outils et de la vaisselle quil utilise quotidiennement à sa table, ou un tisserand de la texture de ses vêtements. Cela même joue plutôt pour le changement parmi les Eldar que pour la constance ; car étant talentueux et passionnés dart les Eldar confectionneront avec empressement de nouvelles choses, à la fois pour le ravissement du regard, ou de loreille, ou de la sensation, ou pour un usage quotidien : que ce soit dans de la vaisselle, dans un vêtement, ou dans une langue. » 9Et plus haut Bertrand (qui ne « musardait » en rien en cela, bien au contraire
« Et vois ! Ami-des-elfes, ces évolutions diffèrent peu des évolutions observées dans le parler des Hommes avec lécoulement du temps. Maintenant, en ce qui concerne les Eldar, nous savons que de telles choses furent réalisées jadis par choix, en pleine connaissance de cause, et alors lon retient souvent les noms de ceux qui dessinèrent de nouveaux mots ou qui les premiers murent dimportants changements. Pour cette raison les Eldar ne croient pas, en vérité, que les évolutions des langues des Hommes soient entièrement inconscientes ; car doù viendraient, disent-ils, lordre et lharmonie si souvent observés dans de tels changements ? ou lhabileté avec laquelle à la fois sont modifiés des arrangements et introduits les suivants ? Et certains répondent que la conscience des Hommes sommeille à moitié [ ] » 10Mais nous n'avons toujours contemplé que la tour, avec son style, son goût, sa sonance : gravissons maintenant enfin ses marches sculptées et découvrons ce qu'elle nous donne à contempler. C'est qu'il nous faut intégrer la composante sémantique pour pouvoir conclure sur la langue. Et comme Didier l'a très bien évoqué, les elfes découpent dans le tissu du sens d'autres limites que les nôtres, du fait, sans aucun doute, que leurs fëar se distinguent plus radicalement de ceux des mortels, et qu'ils contemplent eux-mêmes l'histoire d'un point de vue différent, plus large et tourné autrement vers elle, mais aussi et surtout, qu'ils contemplent une histoire qui n'est pas exactement la nôtre. Sans aucun doute des Hommes qui vivraient l'histoire des Elfes, et ce en tout point à la manière des Elfes, pourraient dessiner les mêmes concepts, car la substance sémantique de la langue non plus n'est pas d'une nature plus elfique qu'humaine, mais elle est organisée par l'appréhension de la réalité par l'esprit (certes, Michèle, il nous sera donnés d'appréhender l'Estel, mais ce serait un leurre de croire que cet élément, ou tout autre élément elfique, est réductible à un simple jeu de nuances humaines : déjà, pour pouvoir percevoir (et donc qualifier) ces nuances, il faudrait connaître tous les autres mots de la langue elfique, par rapport auxquels sa valeur sera définie, et toute l'histoire d'Arda, qui a chargé et donné leurs valeurs à ces mots ... cela s'avèrerait possible, ensuite, qu'on ne pourrait raisonnablement qualifier ces nuances d'humaines, car cet élément, comme beaucoup d'autres, porte l'estampille de Faërie ; il est né avec ces lois propres au Conte, et ne peut demeurer vivant sans elles : l'Estel est espérance, oui, mais espérance en Arda, par rapport aux limites et aux choses du monde ardarin et non par rapport à celles du monde primaire, et surtout, je dirais, d'après le point de vue des Eldar et non d'après celui des mortels, chacun percevant sa Guérison (et donc son Espérance) selon les peines et les joies accordées par son destin, et selon la part de Révélation qui lui fut accordée ; et quand tu écris : « Il me semble aussi - mais je peux me tromper - qu'on ne peut percevoir le ressenti in-humain qu'à travers notre humanité elle-même. Et qu'à partir du moment où certains concepts sont trop éloignés de nous, c'est le simple fait de les concevoir, même par opposition, même avec le coeur, qui nous est impossible », tu vois bien que les langues elfiques ne sont pas humaines - Ah !
« Ainsi donc, Ami-des-elfes, si tu veux considérer correctement tout ce dont je tai entretenu pour lors, pas seulement ce qui a été dit formellement, mais encore ce qui doit être saisi par la pensée, tu comprendras maintenant pourquoi, bien que de manière plus consciente, bien que de manière plus lente, les langues des Quendi évoluent de semblable façon à celle des langues mortelles. » 11Ce langage n'a pas lieu d'être plus « humain » qu'« elfique » ; il caractérise des « Parlants », i carir quettar ómainen (Essekenta/391). Lorsque les Elfes, ayant connaissance d'autres races, vinrent à distinguer leur peuple des autres par d'autres mots que celui de quendi « ceux qui parlent », ils constatèrent ce fait et que le langage est ce qui relie entre eux tous les « Parlants », qu'il est ce talent donné en partage à tous. Pour se distinguer, ils se sont appelés les Eldar ; ils sont, eux, distinctivement, le Peuple des Etoiles. Mais alors, ces étoiles brillent d'une manière particulière dans leurs langues ; ces étoiles en font des langues elfiques, des langues « de semblable façon à celle des langues mortelles », mais tournant autrement la conscience, pas seulement celle des Elfes mais aussi celle des Hommes : vers la Nature et l'émerveillement, vers l'Homme et son humanité, et vers le Mystère et la lumière divine. Leurs langues sont faëriques, elles sont comme la langue du Conte, qui permet à l'homme, s'il est enchanté, de recueillir précieusement des milliers de fragments de lumière (non seulement celle de l'espérance, comme le rappelle Ben, mais pas seulement, bien plus encore
13 Arrivé dans la région de Césarée de Philippe, Jésus posa à ses disciples cette question : « Au dire des gens, quest le Fils de lhomme ? » 14 Ils dirent : « Pour les uns, Jean le Baptiste ; pour dautres, Élie ; pour dautres encore, Jérémie ou quelquun des prophètes. » 15 « Mais pour vous, leur ditil, qui suisje ? » 16 SimonPierre répondit : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. » (Matthieu 16)Ici l'enchantement de ce récit porte un nom particulier : c'est la Foi - et c'est tout naturellement que Tolkien relie Enchantement et Foi dans Faërie par « belief », en anglais l'ancien nom de ce que désigne aujourd'hui « faith », mais il faut bien distinguer, naturellement, entre « secondary belief » et « primary belief » : celui qui tente d'appréhender le fait faërique tantôt « d'un point de vue interne » tantôt « d'un point de vue externe » raisonne dans l'un et l'autre cas selon une créance primaire qui ne lui sied pas ...
Hiswelókë :... se sera alors écrié Dongann par devers lui
Autrement dit, il ne serait que temps de désenclaver un peu les langues elfiques et de s'intéresser notamment, que ce soit sur le plan lexical, sémantique ou structurel, aux élements qui justement pourraient ne pas représenter certains traits des langues humaines "en général"
« Foi de bouffon de Faërie ! »
« Ce sont précisément la coloration, latmosphère, les détails individuels inclassables dune histoire et surtout lossature non disséquée de largument qui comptent réellement. » [Faërie/73]
1 « Beowulf has been used as a quarry of fact and fancy far more assiduously than it has been studied as a work of art. [ ] I will here only attempt [ ] to present my view of it allegorically. [ ] the fairy godmother later invited to superintend its fortunes was Historia. And she brought with her Philologia, Mythologia, Archaeologia, and Laographia. Excellent ladies. But where was the child's name-sake? Poesis was usually forgotten; occasionally admitted by a side-door; sometimes dismissed upon the door-step. 'The Beowulf', they said, 'is hardly an affair of yours, and not in any case a protégé that you could be proud of. It is an historical document. Only as such does it interest the superior culture of to-day.' And it is as an historical document that it has mainly been examined and dissected. » [MC/5-6]
2 « The historian's search is, of course, perfectly legitimate, even if it does not assist criticism in general at all (for that is not its object), so long as it is not mistaken for criticism. » [MC/7]
3 « I would express the whole industry in yet another allegory. A man inherited a field in which was an accumulation of old stone, part of an older hall. Of the old stone some had already been used in building the house in which he actually lived, not far from the old house of his fathers. Of the rest he took some and built a tower. But his friends coming perceived at once (without troubling to climb the steps) that these stones had formerly belonged to a more ancient building. So they pushed the tower over, with no little labour, in order to look for hidden carvings and inscriptions, or to discover whence the man's distant forefathers had obtained their building material. Some suspecting a deposit of coal under the soil began to dig for it, and forgot even the stones. They all said: 'This tower is most interesting.' But they also said (after pushing it over): 'What a muddle it is in!' And even the man's own descendants, who might have been expected to consider what he had been about, were heard to murmur: 'He is such an odd fellow! Imagine his using these old stones just to build a nonsensical tower! Why did not he restore the old house? He had no sense of proportion.' But from the top of that tower the man had been able to look out upon the sea. » [MC/7-8]
4 « It is not surprising that it should now be felt that a view, a decision, a conviction are imperatively needed. But it is plainly only in the consideration of Beowulf as a poem, with an inherent poetic significance, that any view or conviction can be reached or steadily held. For it is of their nature that the jabberwocks of historical and antiquarian research burble in the tulgy wood of conjecture, flitting from one tum-tum tree to another. Noble animals, whose burbling is on occasion good to hear; but though their eyes of flame may sometimes prove searchlights, their range is short. » [MC/9]
5 « None the less, paths of a sort have been opened in the wood. Slowly with the rolling years the obvious (so often the last revelation of analytic study) has been discovered: that we have to deal with a poem by an Englishman using afresh ancient and largely traditional material. At last then, after inquiring so long whence this material came, and what its original or aboriginal nature was (questions that cannot ever be decisively answered), we might also now again inquire what the poet did with it. If we ask that question, then there is still, perhaps, something lacking even in the major critics, the learned and revered masters from whom we humbly derive. » [MC/9]
6 « Folk-tales in being, as told for the 'typical folk-tale', of course, is merely an abstract conception of research nowhere existing do often contain elements that are thin and cheap, with little even potential virtue; but they also contain much that is far more powerful, and that cannot be sharply separated from myth, being derived from it, or capable in poetic hands of turning into it: that is of becoming largely significant as a whole, accepted unanalysed. The significance of a myth is not easily to be pinned on paper by analytical reasoning. It is at its best when it is presented by a poet who feels rather than makes explicit what his theme portends; who presents it incarnate in the world of history and geography, as our poet has done. Its defender is thus at a disadvantage: unless he is careful, and speaks in parables, he will kill what he is studying by vivisection, and he will be left with a formal or mechanical allegory, and, what is more, probably with one that will not work. For myth is alive at once and in all its parts, and dies before it can be dissected. It is possible, I think, to be moved by the power of myth and yet to misunderstand the sensation, to ascribe it wholly to something else that is also present: to metrical art, style, or verbal skill. » [MC/15-16]
7 « [ ] seeing that they die not and their memories reach back into ages long past, you understand not why all the race of the Quendi have not maintained the language that they had of old in common still one and the same in all their kindreds. » [PM/396]
8 « [ ] Immortal, within Eä, are the Eldar, but since even as Men they dwell in forms that come of Eä, they are no more changeless than the great trees, neither in the forms that they inhabit, nor in the things that they desire or achieve by means of those forms. Wherefore should they not then change in speech, of which one part is made with tongues and received by ears? [ ] » [PM/397]
9 « But to the changefulness of Eä, to weariness of the unchanged, to the renewing of the union: to these three, which are one, the Eldar also are subject in their degree. In this, however, they differ from Men, that they are ever more aware of the words that they speak. As a silversmith may remain more aware than others of the tools and vessels that he uses daily at his table, or a weaver of the texture of his garments. Yet this makes rather for change among the Eldar than for steadfastness; for the Eldar being skilled and eager in art will readily make things new, both for delight to look on, or to hear, or to feel, or for daily use: be it in vessels or raiment or in speech. » [PM/397-8]
10 « And lo! Ælfwine, these changes differ little from like changes that come in the speeches of Men with the passing of time. Now as for the Eldar we know that such things were done of old by choice, full-wittingly, and the names of those who made new words or first moved great changes are yet often remembered. For which reason the Eldar do not believe that in truth the changes in the tongues of Men are wholly unwitting; for how so, say they, comes the order and harmony that oft is seen in such changes? or the skill both in the devices that are replaced and the new that follow them? And some answer that the minds of Men are half asleep [ ] » [PM/399]
11 « Wherefore, Ælfwine, if thou wilt consider well all that I have said to thee at this time, not only what is plainly expressed, but also what is therein to be discovered by thought, thou wilt now understand that, albeit more wittingly, albeit more slowly, the tongues of the Quendi change in a manner like to the changes of mortal tongues. » [PM/400]
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