La tradition littéraire
Wace
Le Roman de Brut sert de pont entre la matière historique et la littérature médiévale. Wace, dont la source est l’ Historia , écrivit un « roman ». C’est à la psychologie de ses personnages qu’il s’intéresse d’abord. Ainsi, l’histoire de la conception du roi Arthur devient ici un roman d’amour. C’est parce qu’il est épris d’Iguerne qu’Uther demande conseil à Merlin qui l’aidera à accomplir ses désirs : Arthur est né de l’union coupable d’Uther et d’Iguerne. Wace explique tout par l’amour, et s’attarde à décrire les noces du couple amoureux. Il introduit les noms de maints chevaliers arthuriens, mais il n’entre pas dans le détail de leurs aventures. Quand il décrit la cour splendide qu’Arthur réunit à Caerlon-sur-Usk, Wace précise qu’à cette époque la période de paix dura douze ans. Une douzaine de vers suffisent pour indiquer que les chevaliers vécurent alors une suite d’aventures extraordinaires. Mais Wace préfère décrire la vie guerrière : il passe sous silence les aventures romanesques et surnaturelles des compagnons de la Table ronde.
Chrétien de Troyes
« L’oeuvre de Chrétien de Troyes est un confluent où s’unissent les principaux courants de son époque », dit Jean Frappier. Ce n’est donc pas lui, comme on l’a souvent avancé, le créateur du roman arthurien. Si Chrétien n’a pas inventé le thème arthurien, il y a apporté un souci nouveau ; il a voulu créer une oeuvre d’art ; il s’en prend aux mauvais conteurs et proclame, au début de son roman Érec et Énide , qu’il a l’intention de transformer un « conte d’aventure » en une « moult belle conjointure ». Ses romans bretons, ou arthuriens, sont au nombre de cinq : Érec et Énide , Cligès , Lancelot, ou le Chevalier de la charrette , Yvain, ou le Chevalier au lion et, enfin, Perceval, ou le Conte du Graal .
Les problèmes que pose la chronologie de ces oeuvres sont des plus délicats. Selon Anthime Fourrier, Érec aurait été composé aux alentours de 1170, Cligès vers 1176, Yvain et Lancelot , composés plus ou moins simultanément, datent de 1177-1181 ; le Conte du Graal fut commencé après le 14 mai 1181. Chrétien travailla d’abord à la cour de Marie, comtesse de Champagne et fille d’Aliénor d’Aquitaine. C’est pour elle qu’il rédigea le Lancelot . Le mécène pour qui il commença le Conte du Graal fut Philippe d’Alsace, comte de Flandre. Ce dernier roman reste inachevé ; sa composition fut sans doute interrompue par la mort de Chrétien.
Le point de départ des romans de Chrétien, c’est la cour du roi Arthur. Au début de l’ Érec , les chevaliers d’Arthur sont partis à la chasse, et c’est Érec qui se trouve en compagnie de la reine quand le nain d’Yder, le fils de Nut, se présente pour l’insulter. Le Lancelot débute par l’épisode où un robuste chevalier, Méléagant, fils du roi Baudemagus, vient enlever la reine. Yvain, à son tour, quitte la cour pour pénétrer dans la forêt de Brocéliande. Perceval, lui aussi, dirige enfin ses pas vers la célèbre cour des Bretons, tout comme l’a déjà fait Alexandre, le père de Cligès. Mais, à vrai dire, le roi Arthur ne joue dans ces romans qu’un rôle insignifiant. Il évoque un peu les rois fainéants de la France mérovingienne. Chrétien met en scène des héros d’un caractère différent. Certes, ils sont chevaliers, mais combien moins vigoureux que les douze pairs de Charlemagne ou que les vassaux d’Arthur que nous avons connus chez Geoffrey de Monmouth ou chez Wace. Les héros de Chrétien sont déjà des individus, et c’est à leur vie privée que l’auteur s’intéresse. Chrétien ajoute au cycle arthurien non seulement l’épopée de Byzance, mais aussi le roman d’amour. L’état d’âme et la vie amoureuse des héros (et des héroïnes) sont, pour Chrétien, au moins aussi importants que leurs exploits guerriers. Chacun de ses romans pose un problème sentimental et courtois. Ayant conquis son épouse Énide, Érec ne parvient pas à établir la balance entre les devoirs de l’amour et ceux de la chevalerie. Il part avec Énide à la recherche d’aventures parfois mystérieuses, mais surtout à la recherche de l’état d’harmonie du couple dans la société. L’apothéose n’est pas le mariage des jeunes époux, mais la « joie de la Court » et le couronnement d’Érec et d’Énide à Nantes.
Avant d’aborder le problème de Fenice, mariée à un homme qu’elle n’aime pas, mais amoureuse de Cligès, Chrétien raconte, dans le premier tiers du roman, l’histoire des parents de celui-ci. Là, il renouvelle le célèbre jeu de mots d’Ovide où le « mal d’aimer », ce « mal amer », n’est pas compris : on croit que les amants souffrent de « mal de mer » ( mare , amare , amarum ). Marie de Champagne donna à Chrétien le « sens » et la « matière » de son Lancelot . Cette fois, le mariage n’est pas la consommation de l’amour ; il est un obstacle. Guenièvre, la femme du roi Arthur, éprouve une passion coupable pour Lancelot, le chevalier qui, pour délivrer sa bien-aimée, monte dans la charrette infâme. Mais leur amour n’a rien de platonique. En nous décrivant la nuit que Lancelot et Guenièvre passent ensemble, Chrétien souligne seulement que l’amour courtois est à la fois amour spirituel et amour charnel.
Chrétien de Troyes n’était pas assuré de sa doctrine sur l’amour. Dans son Yvain , il reprend le thème de l’amour qui trouve son épanouissement dans le seul mariage. Et même, chassé par son épouse, le héros perd la raison. Cependant, à la fin du roman, Yvain et sa femme se trouvent réunis. Pour l’auteur, tout est dit.
Son dernier roman, écrit pour le comte de Flandre, nous raconte la vie d’un orphelin gallois. Élevé par sa mère dans la forêt, il se rend, contre son gré, à la cour d’Arthur. Le fier jeune homme y apprend l’étiquette de la civilisation courtoise. C’est dans ce roman que Chrétien introduit le thème du Graal, mystère religieux qu’il effleure seulement. Nous ne connaîtrons jamais le sentiment de Chrétien sur cette sainte allégorie, car la mort vint interrompre son oeuvre.
On le voit, pour Chrétien, c’est à la cour du roi Arthur que naissent les aventures des chevaliers dont les noms lui ont été donnés par ses devanciers. Grâce au poète champenois, le cycle arthurien prend un aspect nouveau, un rythme plus ferme. Ajoutant à l’analyse de l’amour un goût pour l’aventure et pour le merveilleux, Chrétien a fourni une immense contribution à la littérature. Les guerres, les combats, les événements historiques sont subordonnés à l’étude de sentiments exquis dans un milieu courtois. Cependant les épisodes extraordinaires ne manquent pas ; les chevaliers pénètrent jusqu’aux confins de l’Autre Monde (Lancelot dans le royaume de Gorre, Érec à la joie de la Court), d’autres se battent avec des géants ou des bêtes sauvages (Yvain vient au secours d’un lion attaqué par un serpent), d’autres encore ont des aventures prophétiques et symboliques (Lancelot au Cimetière périlleux, ou traversant le Pont de l’Épée), mais Chrétien nous ramène toujours au monde familier et réel du XIIe siècle. Même les aventures les plus étranges ont leur côté familier : au château de Pesme Aventure, Yvain délivre de jeunes captives et se bat contre deux monstres ; là aussi, le héros passe des moments délicieux dans un verger, où la fille du seigneur, un livre à la main, lit à haute voix un roman à son père et à sa mère. Dans cette scène de la vie quotidienne, avec une adresse pleine de charme, Chrétien évoque les plaisirs intellectuels de la société pour laquelle il composait ses oeuvres.
Les successeurs de Chrétien : les romans en prose
Vers la fin du premier quart du XIIIe siècle, un auteur anonyme propose à ses contemporains une vaste série de romans arthuriens, écrits en prose, et qui mérite bien le titre de « cycle arthurien ». Ce cycle, dit « Vulgate », ou Lancelot-Graal , retrace l’épopée du royaume d’Arthur depuis ses origines jusqu’à la chute de ce petit univers civilisé qu’était la Table ronde. Divisé en cinq sections principales, il ajoute à l’histoire légendaire de la Bretagne maint épisode romanesque où les chevaliers errants partent à la recherche des aventures du royaume de Logres. Le centre de ce cycle, c’est le Livre de Lancelot du Lac , appelé par les savants le Lancelot propre . Le héros, Lancelot, est le fils du roi Ban de Benoic, province gauloise ; il est élevé par la Dame du Lac, qui le protège de ses ennemis en le cachant dans son palais, bâti au fond d’un lac. Le jeune chevalier arrive à la cour d’Arthur où il tombe amoureux de Guenièvre. Le Lancelot raconte les amours de Lancelot et de la reine, ainsi que les exploits chevaleresques du héros et de ses compagnons de la Table ronde. Sous l’influence d’un philtre, Lancelot, de passage au château du Graal, succombe à la tentation. Ainsi naît Galahad. Le romancier donne une large place aux guerres du roi Arthur, ainsi qu’à un thème désormais intégré à l’imagerie chrétienne, celui du Saint Graal. Ce long récit se termine au moment où le jeune Galahad arrive à Camelot. Vient ensuite La Queste du Saint Graal , où les chevaliers font le voeu de percer les mystères du Graal et de les montrer de façon plus « aperte », ou claire. Seuls Bohort, cousin de Lancelot, Perceval et Galahad parviennent à la ville sacrée de Sarras, où est célébrée enfin la messe du Saint Graal. Galahad est accueilli au paradis, Perceval meurt à Sarras, et c’est Bohort qui revient à la cour pour raconter ces merveilles. À Camelot, l’atmosphère oppressante qui caractérise les derniers jours de la « Queste », alors que sont morts plusieurs des compagnons de la Table ronde, devient plus lourde encore. La Mort le Roi Artu , dernier épisode du cycle, s’ouvre au moment où les ennemis de Lancelot révèlent au roi les amours adultères de la reine et de Lancelot. Arthur bannit son ami et quitte lui-même le royaume de Logres pour vaincre les Romains. Pendant son absence, son neveu Mordred – qui est aussi son fils – s’empare de la couronne et de la personne de la reine. Arthur revient et, aidé trop tard par Lancelot, tue son neveu dans une dernière bataille où succombe la fleur de la chevalerie arthurienne. Ainsi se trouve bouclé le cycle. Plus tard y furent ajoutés commentaires et explications, ainsi l’ Estoire del Saint Graal qui raconte comment le Graal, la coupe de la Cène, est apporté en Bretagne, et l’ Estoire de Merlin qui narre les premiers épisodes de la vie d’Arthur.
Cette immense somme n’est pas une compilation faite au hasard, qui rassemblerait dans un ordre quelconque, pour composer un « cycle » arthurien, des fragments de romans. Au contraire, c’est une oeuvre construite, et d’après un plan remarquable. La chronologie est strictement observée, et si nous sommes invités à abandonner, pour ainsi dire, les aventures d’un chevalier pour lire les exploits d’un autre, nous retrouverons plus tard la suite de l’épisode interrompu. On passe d’une aventure à une autre, mais à la fin tout s’éclaire. Chaque épisode renvoie à un autre, de sorte qu’il est impossible de découper arbitrairement le récit. C’est un tout indissociable. On a comparé le système à une tapisserie : « Si on y pratique des coupures, tout part en morceaux. »
Unique dans sa structure, complexe et remarquable, ce cycle ne comporte pas que des épisodes purement romanesques. On y aborde des thèmes profonds : le héros mondain, Lancelot, cède la place à son fils, Galahad, le héros touché par la grâce. La présence du Saint Graal se fait sentir bien avant la Queste. Les tribulations en Bretagne du Saint Graal ne peuvent trouver un terme que grâce à l’action d’un chevalier saint, presque un messie. Il ne s’agit plus de faire triompher l’idéal militaire de la chevalerie, mais de l’enrichir d’une sainte mission. Les valeurs spirituelles s’en trouvent rehaussées par rapport aux exigences mondaines. Ainsi raisonnait la dialectique médiévale.
Le cycle du Lancelot-Graal resta populaire jusqu’à la fin du Moyen Âge, et même pendant la Renaissance. De somptueux manuscrits, des exemplaires de luxe, furent copiés au XVe siècle et le nouvel art de l’imprimerie répandit ces textes dans un public plus large. La « Vulgate » fut remaniée et d’autres romans arthuriens en prose furent rédigés, tels le Tristan en prose, le Guiron le Courtois ou le roman de Palamède et la Compilation faite par Rusticien de Pise, sous le règne d’Édouard Ier d’Angleterre.
Les romans en vers
Le roman arthurien en vers ne disparut pas pour autant. Au roman de Perceval , que Chrétien de Troyes avait laissé inachevé, on ajouta des Continuations , dont les unes sont anonymes et d’autres l’oeuvre de Gerbert de Montreuil et de Manessier. Gauvain, le neveu du roi Arthur, y joue un rôle important. D’autres poèmes furent consacrés à Gauvain, par exemple les Enfances de Gauvain et le charmant poème anglais Sire Gauvain et le Chevalier Vert . Parmi les mieux construits des romans en vers, citons La Vengeance de Radiguel et Meraugis de Porlesguez , par Raoul de Houdenc, L’Âtre (ou le Cimetière) périlleux , Le Bel inconnu , que l’on a attribué à Renaut de Beaujeu, et le Roman d’Escanor . Le goût pour le long roman en vers persista jusqu’au XIVe siècle. Le plus long des romans arthuriens en vers est celui de Meliador que composa Jehan Froissart.
Dans tous ces romans en vers, nous retrouvons le décor familier de l’univers arthurien. Les royaumes de Logres, d’Écosse, de Cornouailles ou d’Irlande, où se trouvent les villes « arthuriennes » de Carlion, de Camelot, de Tintagel, sont fréquemment nommés. Les personnages arthuriens, le roi et son épouse Guenièvre, son neveu Gauvain, Mordred le traître, Lancelot et ses cousins Bohort et Lionel, la fée Morgain et Merlin, l’enchanteur et le prophète, évoluent sous les yeux du lecteur. Le plus souvent, le poète raconte la vie et les aventures d’un chevalier peu connu qui devient le héros du roman. Raoul de Houdenc choisit Meraugis de Porlesguez, le neveu du roi Marc de Cornouailles, Girard d’Amiens crée le roman d’ Escanor , un auteur inconnu nous raconte les amours de Floriant et Florete . Il serait fastidieux de dresser le catalogue complet du roman en vers : il suffit de préciser que la popularité du genre est à la mesure de la force de conviction de la légende arthurienne qui, au XIIIe siècle, comprend entre autres les romans de Tristan et Iseult , et les romans du Graal.
Les versions européennes
Les thèmes bretons se répandirent dans l’Europe entière. Les romans français servirent de modèle aux traductions et aux adaptations. Le poète allemand Hartman von Aue traduisit l’ Érec et l’ Yvain de Chrétien de Troyes. Wolfram von Eschenbach composa sa version du roman du Graal d’après l’oeuvre de Chrétien. La source française du Lanzelet d’Ulrich von Zatzikhoven n’a pas été conservée, mais ce roman biographique contient la version la plus vieille des « enfances » de Lancelot, traduites, à en croire Ulrich, d’après un livre français que posséda Hugh de Morville.
En Italie, la Tavola ritonda présente, sous forme de cycle, le roman d’Arthur. Des versions espagnole et portugaise d’un cycle tardif en prose offrent une Queste du Saint Graal , dont l’original français n’existe que sous la forme de fragments épars. Ajoutons que les romans arthuriens ont été traduits en scandinave, en néerlandais, en tchèque, etc., qu’il existe un roman provençal de Jaufré , et même des romans écrits directement en latin médiéval, tels De ortus Walwani et l’ Historia Meriadoci . Les pays celtiques, où les romanciers ont trouvé leurs thèmes, engendrent à leur tour des versions des romans arthuriens. Des versions galloises, les Mabinogion , offrent les mêmes récits que présente Chrétien de Troyes, outre le charmant poème de Kulwch et Olwen , et le magnifique Songe de Rhonabwy . Les liens qui unissent cette tradition galloise à la tradition française ont été souvent discutés. Disons que la tradition celtique est fort riche, et d’une valeur littéraire considérable.
Mais les thèmes bretons font retour à la Grande-Bretagne. D’une part, les romans français sont traduits en anglais ; Sir Tristrem ( Tristan et Iseult ), Arthour and Merlin , Lancelot of the Laik (version écossaise), The Holy Grail (l’ Estoire del Saint Graal ), Le Morte Arthur (version strophique de La Mort le Roi Artu ) en sont quelques-uns parmi les plus importants ; d’autre part, les poètes anglais ont composé des romans nouveaux, mais inspirés des romans français. Les poètes moyen-anglais ont fait de Gauvain leur héros favori ; citons Ywain and Gawain , Sir Gawain and the Carl of Carlisle , The Turk and Gawain ou The Green Knight . Ce dernier roman raconte la même histoire que celle que l’on trouve dans Sir Gawain and the Green Knight ( Sire Gauvain et le Chevalier Vert ), véritable chef-d’oeuvre qui nous est parvenu grâce à un manuscrit unique. Ce roman comprend deux thèmes principaux, celui de la triple tentation de Gauvain en présence de l’épouse du Chevalier Vert, et celui de l’épreuve de la décapitation. Le Chevalier Vert s’y soumet, à condition que son bourreau la subisse à son tour au bout d’un an. Le Chevalier Vert, Bercilak, ramasse sa tête coupée et disparaît ! Le style, la poésie, le réalisme de ce récit, qui caractérisent l’art exquis du conteur, en font un des romans arthuriens les plus achevés.
En Angleterre également, tout à la fin du Moyen Âge, les anciens romans arthuriens retrouvent une vogue nouvelle. L’imprimeur William Caxton avait eu l’heureuse idée d’éditer pour la première fois la traduction, ou plutôt le remaniement dont sir Thomas Malory était l’auteur. Dans une prose nerveuse, Malory fait revivre non seulement le cycle français, le Lancelot en prose, La Queste du Saint Graal et La Mort le Roi Artu , mais aussi une version anglaise de la Mort Arthure , le Tristan en prose et l’ Estoire de Merlin , ainsi qu’une Suite importante de ce dernier. C’est grâce à sir Thomas Malory que les romans de la Table ronde font partie du patrimoine littéraire des Anglais et qu’ils sont toujours vivants.
Qui était sir Thomas ? Un prisonnier politique, victime de la guerre des Deux-Roses ? C’est en 1485 que Caxton présente au public ces récits héroïques, où les méchants sont toujours punis. Pour cet éditeur, le roman comportait une morale : « Imitez le bon, fuyez le mal, et vous serez amenés à la bonne renommée », nous dit-il, faisant en cela écho aux romanciers français et aux vieux imprimeurs français qui, dans des prologues mis en tête des versions tardives des romans arthuriens, disent franchement : « Les choses mal faictes sont escriptes au livre pour les fouir et éviter, et les bonnes pour les ensuyvre, et les accomplir, chacun de bon voloir. »
À en croire les prologues, les romans de la Table ronde sont surtout des manuels de chevalerie. C’est la valeur littéraire et esthétique de ces textes, surtout de l’oeuvre de Malory, qu’il faut souligner.