Hors des ombres de la légende,
je commence à comprendre un peu la merveille des arbres »

Le Seigneur des Anneaux, Tome 2, Livre3, Chapitre 8.

 

Plan de l’article

Introduction

Première partie

I – Les Deux Arbres de Valinor
II – L’Arbre Blanc
III – La Malinornë

IV – Des Arbres par monts et par vaux

4.1) L’Oiolairë
4.2) Le Yavannamirë
4.3) Le Lairelossë
4.4) Le Nessamelda
4.5) Le Vardarianna
4.6) Le Taniquelassë
4.7) Le Laurinquë
4.8) Le Lavaralda
4.9) Le Lebethron
4.10) Un arbre de Fangorn

Conclusion : Les arbres chez Tolkien

Deuxième partie

Documents Complémentaires
Lexique des Termes Botaniques
Tableau récapitulatif des noms
Index
Bibliographies

Introduction

Si l’on se réfère au dictionnaire, l’arbre est un végétal ligneux, vivace, de grande taille, dont le tronc fixé au sol par les racines porte les branches. Cette définition, bien que juste, n’en est pas moins réductrice en omettant l’aspect et le rôle culturel, historique et poétique que possède l’arbre. De l’Araucaria, arbre sacré pour les Indiens Pehuenche aux Platanes qui ombragent les places de Provence, les arbres et les hommes sont intimement liés, même si certains l’ont malheureusement oublié.

Tolkien ne fait visiblement pas parti de ces derniers, il semble réellement aimer et connaître les arbres. Ses descriptions de la Terre du Milieu comprennent de nombreuses essences qui nous sont familières. Que ce soit le Bouleau nommé Brethil en sindarin ou le Saule appelé Tathar en quenya mais également d’autres, comme le Mallorn, que l’auteur a inventée et introduite. Ce n’est parfois qu’un simple nom mais on peut également trouver des portraits assez complets.

L’arbre élément unificateur entre le ciel et la terre, l’arbre qui tient à la fois du roc et de la source s’avère bien souvent être plus qu’un simple élément du décor aussi bien dans les récits et les légendes que dans les textes de Tolkien, il lui arrive de sortir de l’arrière plan pour se mêler à l’histoire des Elfes et des Humains.

Des arbres mythiques de Valinor au Lebethron des charpentiers du Gondor c’est un voyage à la découverte des arbres propres à Arda qui débute.

I) Les deux Arbres de Valinor

  • Laurelin, nom Quenya composé de ‘laure’ : or, lumière or et de ‘lin’ : note de musique, on pourrait traduire ce nom par “Or Chantant”, “Or Musical” ou “Chant d’Or”.
  • Malinalda, nom Quenya contenant ‘malina’ : jaune et ‘alda’ : arbre massif, littéralement Arbre Jaune mais “Arbre d’Or” est plus proche de la réalité.
  • Culúrien, nom Quenya, ‘cul’ : rouge doré ; On peut imaginer un nom comme “Arbre Doré” voir “Arbre de flamme” en référence à la couleur.
  • Le nom Lindeloksë apparaît dans les Contes Perdus, il s’agit d’une correction de Lindeloktë et de Lindelótë. On y trouve ‘linde’ : chanteur, chanson et ‘loktë’ : grappe de fleurs. (mais également ‘lóte’ : grande fleur blanche dans Lindelótë mais la description des fleurs ne correspond pas). Le nom peut se traduire par “Grappe Chantante” ou “Fleur Chantante”.
  • Telperion, nom Quenya /Lindarin, ‘telpe’ : argent. On peut le traduire par “Arbre d’Argent”.
  • Silpion, nom Quenya composé de ‘sil’ : briller, ‘pio’ : prune, cerise. Le Livre des Contes Perdus traduit ce nom par “Lune-de-Cerise”.
  • Ninquelótë, nom Quenya contenant ‘ninque’ : blanc et ‘lóte’ : grande fleur blanche, ce qui donne “Fleur Blanche”.

A tout seigneur tout honneur, commençons par ce qui fut probablement la plus grande merveille des Jours Anciens, Telperion et Laurelin les deux arbres de Valinor.Les deux Arbres sont nés du chant de Yavanna lors de la construction de Valinor, après la destruction des lampes par Melkor.

Il semble qu’à l’origine Tolkien pensait donner à chacun des Arbres une descendance comme le montre cet extrait de « La venue des Elfes et la Construction de Kôr » (Le Livre des Contes Perdus, tome  1) : « les Dieux donnèrent à Inwë et à Nólemë une pousse de chacun de ces arbres glorieux » ainsi que dans « La chute de Gondolin » (Le Livre des contes Perdus, tome 2) : « De chaque côté des portes du palais étaient deux arbres, l’un qui portait une floraison d’or et l’autre d’argent, et ils ne se fanaient jamais, car ils étaient d’antiques scions des Arbres glorieux de Valinor qui illuminaient ces endroits avant que Melko et la Tisseuse de Pénombre ne les flétrissent : et ces arbres les Gondothlim les nommaient Glingol et Bansil. ».
Au final Telperion est le seul pour lequel l’auteur conservât l’idée. Yavanna en fit une réplique, pour les elfes, identique à l’original sauf qu’il ne produisait pas de lumière. De ce plant descend l’Arbre Blanc de Minas Tirith.

Pour Laurelin on trouve dans « Une description de l’île de Númenor » (Les Contes et Légendes Inachevés, le Second Âge) une allusion au Laurinquë qui pourrait en être issu mais c’est une fausse idée qu’avaient les gens de Númenor.

Le temps des Arbres connut un achèvement brutal lorsque Melkor revint en Valinor pour voler les Silmarils. Il blessa les Arbres et Ungoliant aspira leur lumière et leur sève avant de les empoisonner. Après ces évènements les lamentations de Nienna et le chant de Yavanna donnèrent un unique fruit à Laurelin et une dernière fleur à Telperion qui permettront la création du soleil et de la lune. Les deux arbres morts ne furent pas déracinés mais laissés en place. Dans le tome 2 du Livre des Contes Perdus on nous parle de la Sortie de l’Avant et de la renaissance du Soleil Magique où « Laurelin et Silpion seront illuminés à nouveau » .

Deux textes nous narrent la naissance des Arbres, ce sont « La venue des Valar et la construction de Valinor » (dans Le Livre des Contes Perdus, tome 1) qui est le plus ancien et « Au commencement des Jours (le chapitre 1 de Quenta Silmarillion).

On peut noter un certain nombre de différences entre eux mais il y en a deux à relever en particulier :

  • dans le premier Laurelin est l’aîné des arbres tandis que par la suite si la première pousse de chaque arbre apparaît en même temps Telperion est le premier à ce développer et à offrir sa lumière.
  • dans les Contes Perdus, les Arbres vont croîtrent sur l’emplacement de vastes fosses où les Valar ont déversé de la lumière, de plus Vána et Lórien sont directement impliqués et dans les préparatifs associés à Laurelin et Telperion

A l’inverse dans le Silmarillion les Arbres poussent sur une colline bénie par Yavanna. Ici elle seule participe aux préliminaires de la naissance des Arbres. Il y a une allusion à Nienna et à ses pleurs mais son rôle n’est pas clairement défini. On peut bien sur imaginer que ses larmes représentent l’eau, mais son implication réelle dans la naissance des arbres est très floue.

En revanche la description des Arbres ne varie guère, la première version étant la plus détaillée. On peut en dégager les éléments suivants.

Telperion est un arbre au houppier* dense et fournit, ses branches sont nombreuses et entremêlées. Son tronc est un fût* droit et élancée, il est recouvert d’une écorce blanche, lisse et douce. Ses feuilles ont une forme triangulaire à sagitté* et sont d’un vert sombre sur la face supérieure et argentée sur la face inférieure. Sa floraison se compose d’une abondance de fleurs blanches. Il répand une lumière argentée qui fluctue au rythme de la vie de l’arbre. La traduction du nom Silpion nous permet d’envisager que le Cerisier (Cherry-tree en anglais) soit à la base de l’arbre.

Laurelin est également un arbre de grande taille au tronc droit recouvert d’une écorce lisse de couleur crème. Son houppier est moins dense que celui de Telperion mais il est plus étalé. Son feuillage est panaché*, la feuille est vert tendre au centre avec un liseré dorée sur le pourtour. Sa floraison se compose d’une multitude de grappe de fleurs pendantes de couleur or. D’ailleurs il semble que Tolkien imaginait Laurelin (surtout au niveau des fleurs) comme proche des Laburnum et plus particulièrement du Cytise Pluie d’Or (Laburnum x wateri ‘‘Vossii’’).

La lumière émise par Telperion et Laurelin, argentée pour l’un et dorée pour l’autre, provient de leurs feuillages et de leurs fleurs mais également de leurs troncs, ce dernier point n’étant précisé que dans le premier texte.

Leur lumière croit et décroît au cour de la journée, chacun voyant sa lumière atteindre son apogée pour ensuite diminuer, et à la dernière heure du cycle de chaque arbre la lumière de celui sur son déclin et celle renaissante du second se mélangeaient. Ainsi Valinor connaissait tous les jours deux moments où la lumière mêlée de Telperion et Laurelin se répandait.

Deux arbres qui diffusent une lumière illuminant les êtres et les terres, on peut y voir un symbole de sagesse et de pouvoir. Cette idée se retrouve dans des expressions qui nous laissent entendre que ceux ayant connu la lumière des Arbres devinrent plus grands que les autres.

« Melian donna de grands pouvoirs à Thingol, qui était déjà grand parmi les Elfes, car il était le seul de son peuple à avoir vu de ses yeux les Arbres quand ils fleurissaient encore. »

(Le Silmarillion, chapitre 4)

 

On peut les rapprocher du frêne Yggdrasil au pied duquel se trouve «Mimisbrunn (la source de Mimir) qui recèle la sagesse et l’intelligence », grâce à laquelle Odin gagne en sagesse et découvre le secret des runes, et « la source très sacrée qui est appelée Urbardrunn ; c’est là que les dieux tiennent conseil ». Cette comparaison est d’autant plus justifiable au regard du premier texte où la lumière à une consistance liquide. Avec une distinction majeure, pour acquérir ces connaissances Odin perdra un œil et il restera pendu à l’arbre pendant neuf jours et neuf nuits alors que les deux Arbres dispensent leur lumière librement et à Valinor tous y on accès.

De même que les Ases des mythes scandinaves se réunissent au pied du Frêne, les Valar s’assemblent dans le Máhanaxar, le Cercle du Destin, qui se trouve non loin des Arbres. Leurs conseils et leurs décisions se trouvent ainsi illuminés par leur lumière.

Cependant les différences sont nombreuses, la plus évidente bien entendu est qu’il y a deux arbres à Valinor. Yggdrasil est l’Arbre Cosmique un point central de la création, il représente l’axe de l’Univers, ses racines traversent les mondes inférieurs et sa cime touche les cieux. Yggdrasil est constamment agressé par un serpent qui ronge ses racines et des cerfs qui broutent les jeunes poussent mais l’arbre survit et même après Ragnarok le crépuscule des Dieux, le frêne est toujours debout.

Telperion et Laurelin s’écartent de l’image de l’Arbre Cosmique, ils ne représentent pas un lien entre les différents « mondes » ni l’axe central, ils n’apparaissent que bien après la création d’Arda et ils s’avèrent mortels. Ils ne connaîtront qu’une seule attaque qui leur sera fatale, leur mort bien que marquant la fin d’une époque ne représente pas la fin du monde.

Une autre différence, qui tient peut être plus de la vision qu’avait Tolkien que de la nature des Arbres, est l’absence de culte qui leur est rendu. L’Arbre Cosmique est un élément que l’on retrouve dans de nombreuses traditions et des pratiques liturgiques (parfois sanglantes) lui sont associées. Encore une fois ce n’est pas le cas pour les Arbres de Valinor, ils sont aimés et respectés par les Valar et les Elfes mais on ne peut pas parler de pratique religieuse.

Parlons également de l’arbre de la Connaissance du Bien et du Mal qui se trouve dans le Jardin d’Eden. Adam et Eve transgressent l’interdit en goûtant le fruit de l’arbre, il en résulte qu’ils gagnent la connaissance du bien et du mal (on retrouve le rôle de l’arbre) mais perdent leur innocence et ils sont chassés du jardin d’Eden. Ils deviennent mortel et soumis aux divers maux qui touchent les hommes.

Nous avons avec les Silmarils une situation un peu similaire. Les joyaux ont étés crée à partir de la lumière de Laurelin et Telperion, ont peu donc les considérer comme les fruits des Arbres. Les sentiments que Fëanor va développer vis à vis des Silmarils provoquera sa chute et celle des Noldor, il les refusera à Yavanna pour qu’elle fasse renaître les Arbres de Valinor (cette idée nous conforte d’ailleurs dans l’assimilation des Silmarils aux fruits des Arbres). Mais n’oublions pas Melkor qui par le vol des Silmarils provoquera une série d’événements dramatiques ainsi qu’à l’occasion de ce vol le premier meurtre :

« Ils dirent que Melkor était là lui aussi et qu’il s’était rendu à la demeure de Fëanor où, devant la porte du château, il avait tué Finwë, le roi des Noldor, et versé ainsi le sang pour la première fois au Royaume Bienheureux. »

(Le Silmarillion, chapitre 9).

 

Au fur et à mesure Telperion prend l’ascendant sur Laurelin. Il devient l’aîné des deux Arbres (et la lune la première à apparaître sur la Terre du Milieu).

De même il est dit que des deux arbres c’est Telperion qui est le plus aimé par les Elfes, il est le seul dont d’autres arbres sont issus et l’Arbre Blanc crée à son image a une place importante dans les autres récits.

On peut également citer un passage des Contes Perdus qui bien qu’abandonné par la suite se révèle intéressant au vue des éléments précédents :

« Maintenant Melko prend l’arme qui lui reste, un poignard, et veut blesser le tronc de Silpion autant que le temps lui permet ; mais un Gnome nommé Daurin qui vagabonde depuis Sirnúmen avec un vaste pressentiment de malheur le voit et vient vers lui, criant à haute voix. »

( Le Livre des Contes Perdus, tome 1)

 

Ce n’est sûrement pas un hasard si Daurin arrive lorsque Melko attaque Telperion et non avant.

L’importance que semble prendre Telperion par rapport à Laurelin est assez curieuse. On le sait dès le départ aimé par Lórien, il se trouve ainsi indirectement lié au rêve, sa lumière évoque les nuits étoilées et le sommeil. Nous avons peut être là une évocation du destin des Elfes, de leur disparition progressive face aux Humains, jusqu’à ce qu’ils ne soient plus qu’un rêve. Il aurait donc le premier rôle car nous sommes dans l’age des Elfes (les Humains n’étant même pas encore éveillé).

A moins que tout simplement Tolkien ait eu une préférence pour l’un de ses arbres.

Par certain côté ont peut dire que se sont Telperion et Laurelin qui ont eut le plus grand impact sur le destin d’Arda car sans eux les Silmarils de Fëanor, qui furent la cause de tant d’évènements et de peines, n’auraient jamais été crée. Et de même c’est un reflet de la lumière d’un Silmarils donc des arbres eux-mêmes qui aidera Frodon dans sa quête.

« Mais c’est une longue histoire, naturellement, qui dépasse le bonheur pour passer dans l’affliction et au-delà – et le Silmaril poursuivit sa course pour venir à Eärendil. Et pourquoi, Monsieur, je n’avais jamais pensé à ça ! Nous avons … vous avez une parcelle de sa lumière dans ce cristal d’étoile que la Dame vous a donné ! Mais, quand on y pense, nous sommes toujours dans la même histoire ! Elle se continue. Les grandes histoires ne se terminent-elles jamais ?
Non, elles ne se terminent jamais en tant qu’histoire, dit Frodon. Mais les gens qui y figurent viennent, et disparaissent quand leur rôle est terminé. Le nôtre se terminera tôt ou tard … et plutôt tôt. »

Le Seigneur des Anneaux, tome 2, livre 4, chapitre 8

 

Les grandes histoires ne se terminent jamais, les protagonistes changent et Telperion quitte le devant de la scène pour laisser la place à l’Arbre Blanc.

II) L’Arbre Blanc

  • Galathilion, nom Sindarin. ‘galadh’ : arbre et ‘thilio’ : briller traduisible par Arbre Brillant ou Arbre Luisant
  • Celeborn, nom Sindarin contenant ‘celeb’ : argent et ‘orn’ : arbre, donnant Arbre d’Argent
  • Nimloth (forme Sindarine de Ninquelótë), de ‘nim’ : blanc et ‘loth’ fleur, Fleur Blanche
 

L’Arbre Blanc fut créé par Yavanna à l’image de Telperion, elle en fit don aux elfes de Valinor qui le nommèrent Galathilion et le plantèrent au pied de la tour d’Ingwë à Tirion. Il donna de nombreux plants, l’un d’eux fut planté en Tol Eressëa et appelé Celeborn.

Ce sont les elfes de Tol Eressëa qui introduisirent l’Arbre Blanc à Númenor, ils offrirent pour leur mariage, en 870 du Second Age un rejeton de Celeborn baptisé Nimloth à Aldarion et Erendis. L’arbre fut planté dans les jardins d’Armenelos où il allait fleurir pendant de longues années.

Nimloth devait périr lors des derniers temps de Númenor, Sauron ayant réussi à convaincre le roi Ar-Pharazôn de l’abattre puis de le brûler. C’est Isildur qui parvint à sauver un fruit de l’arbre en s’introduisant subrepticement dans les jardins d’Armenelos. La graine fut semée en secret par Amandil et au printemps une pousse apparut.

Lorsque les Fidèles quittèrent l’île avant sa submersion en 3319 du Second Age, Isildur emporta avec lui le jeune arbrisseau qu’il planta au royaume de Gondor, à Minas Ithil (3320 du Second Age). L’Arbre Blanc gagna ainsi la Terre du Milieu.

Ce descendant de Galathilion ne devait vivre que peu de temps car en l’année 3429 du Second Age Sauron prit Minas Ithil et brûla l’Arbre Blanc, une nouvelle fois Isildur sauva un rejet(5) de l’arbre qu’il installa à Minas Anor la deuxième année du Troisième Age.

L’arbre d’Isildur mourut en 1636 du Troisième Age, l’année de la grande peste où moururent le roi Telemnar et ses enfants, c’est le roi Tarondor qui replanta une graine de l’arbre à Minas Anor en 1640.

Lors du trépas de Belechtor II Surintendant du Gondor en 2872 du Troisième Age, l’arbre du Gondor mourut et personne ne put trouver de graine pour le remplacer. L’arbre mort fut laissé à sa place comme ce fut le cas pour Laurelin et Telperion et lorsqu’on le déracina ce fut

« avec révérence ; et on ne le brûla point, mais il fut remis pour reposer dans le silence de Rath Dinen »

(SdA t3, livre 6, chap 5).

 

Il fallut attendre le 25 juin 3919 du Troisième Age pour que le roi Elessar découvre avec l’aide de Gandalf un nouveau plant de l’Arbre Blanc dans la neige du mont Mindolluin et le plante à Minas Tirith.

Arbre au port érigé et élancé, il possède un tronc droit recouvert d’une écorce de couleur blanche.

Le projet de jaquette que Tolkien dessina pour le Retour du Roi possède un arbre blanc, bien que schématisé, on peut à partir de cette représentation imaginer l’architecture de l’arbre. Le modèle d’Ubreville* correspond assez bien, il se caractérise par un tronc monopode*, une croissance rythmique*, des branches plagiotropes* et une floraison terminale.

Espèce caduque, ses feuilles entières* sont assez longues, de couleur vert sombre sur la face supérieure. La face inférieure présente un duvet* de couleur argentée.

La floraison est estivale, à cette période l’arbre se couvre de nombreuses fleurs de couleur blanche et odorantes. Si la fleur est ouverte au cours de la journée le bouton floral n’éclot que le soir. On rencontre une contradiction dans les textes à ce sujet, dans Aldarion et Erendis il est dit qu’il fleurit en hiver (« couvert de bourgeons qui allaient s’épanouir en fleurs hivernales ») alors que d’autres extraits nous donnent une floraison estivale (« quand vint le mois de juin, l’arbre était couvert de fleurs. »). Cependant il semble plus logique de lui attribuer une floraison estivale, d’une part il y a plus de références à cette époque et d’autre part l’Arbre Blanc est un végétal caduc ce qui implique une période de repos végétatif en hiver, il ne peut donc pas fleurir au cours de cette période.

De plus les fruits apparaissent en automne, ce qui confirme l’idée d’une floraison en été.

La multiplication s’effectue soit par semis de la graine ou par les drageons*. Il est à noter que le semis spontané est insolite car le fruit atteint rarement sa maturité, mais lorsqu’il y arrive la graine conserve sa capacité à germer pendant une très longue période comme le dit Gandalf :

« Car il est dit que, bien que le fruit de l’Arbre arrive rarement à maturité, la vie qui est en lui peut alors rester assoupie durant de nombreuses années, et nul ne peut prévoir le moment de son réveil. »

(Le Seigneur des Anneaux, tome 3, livre 6, chapitre 5)

 

Il est résistant au froid et il arrive à pousser dans des conditions hostiles, Aragorn trouve un arbrisseau sur le mont Mindolluin :

« il y avait derrière lui une pente rocailleuse qui descendait des lisières de la neige ; et, comme il regardait, il perçut que, isolé dans ce désert, poussait quelque chose. Il grimpa jusque-là, et il vit que, du bord même de la neige, jaillissait un tout jeune arbre »

(Le Seigneur des Anneaux, tome 3, livre 6, chapitre 5)

 

L’Arbre blanc a une longévité très importante, elle dépasse allégrement les 1000 ans, Nimloth vécu 2442 ans (le seul des arbres portant un nom dont on connaît la date de mort) et il est probable que Galathilion et Celeborn vécurent plus longtemps. En Terre du Milieu il semble bénéficier d’une longévité moindre mais les deux sujets morts naturellement ont duré respectivement 1634 ans et 1232 ans.

Si à une échelle humaine cette durée semble démesurée on trouve bon nombre de végétaux atteignant des âges vénérables s’ils ne sont pas dérangés. Ainsi une espèce de Pin (Pinus longaeva) peut vivre entre 3000 et 5000 ans, l’If (Taxus baccata) dont certains représentant sont âgé de 5000 ans, le Séquoia géant (Sequoiadendron giganteum) de 3000 à 4000 ans, etc. On peut donc penser que Galathilion et Celeborn durent probablement vivre quelques siècles voire millénaires de plus que Nimloth.

En revanche il présente une croissance lente. Nimloth est planté en 870 SA, douze ans plus tard Aldarion constatera que l’arbre « n’avait atteint qu’une douzaine de pieds » soit environ 3.66 m.

Bien qu’ayant un bois de bonne qualité aucun Arbre Blanc n’a jamais été coupé pour celui-ci. On peut voir ici un respect dût à son origine, l’Arbre Blanc est uniquement employé pour ses qualités ornementales (sa floraison, son feuillage et la couleur de son écorce permettent d’éclairer un coin sombre) et en tant qu’arbre d’ombrage. Il est toujours planté en isolé.

L’Arbre Blanc a une grande importance dans l’histoire de la lignée d’Elros, chaque mort d’un des arbres coïncidant avec un événement marquant pour les rois de Númenor puis ceux du Gondor, de même la découverte du dernier Arbre Blanc après de nombreuses années où il avait disparu correspond au retour d’un roi en Gondor.

Trésor de Númenor au même titre que les palantiri, l’Arbre Blanc est l’emblème des Dúnedains, il figure sur l’étendard déployé par Aragorn ainsi que sur les surcots des gardes de Minas Tirith.

« De grands vaisseaux et de grands rois
Trois fois trois
Qu’ont-ils apporté de la terre effondrée,
Sur le flot de la mer ?
Sept étoiles et sept pierres
Et un arbre blanc. »

(Le Seigneur des Anneaux, tome 2, livre 3, chapitre 11)

 

L’Arbre Blanc et la lignée d’Elros

L’Arbre Blanc rentre dans l’histoire humaine avec l’arrivée de Nimloth à Númenor, il n’est au départ qu’un élément décoratif, un présent des Elfes. Cependant il acquiert un nouveau rôle et se retrouve lié à la dynastie des rois par Tar-Palantir le vingt quatrième roi de Númenor qui annonce que si l’arbre périt la lignée des rois disparaîtra également :

« Il rendit à l’arbre blanc les soins et les honneurs qui lui étaient dus, prédisant que la dynastie des rois s’éteindrait quand l’arbre périrait. »

(Le Silmarillion, Akallabeth)

 

A partir de là on peut dans une certaine mesure comparer les événements marquants :

  • Nimloth est déraciné et plus tard a lieu la submersion de Númenor et la fuite des Fidèles qui se trouvent eux aussi déracinés.
  • A la même époque Isildur est blessé en sauvant un fruit de l’arbre, il ne se rétablit qu’au printemps lorsque la première feuille apparaît. Le parallèle est intéressant, dans un premier temps l’arbre est condamné à être abattu mais Isildur récupère un fruit (que l’on peut assimiler à un enfant) mais il est atteint et reste mourant tout l’hiver (époque où les végétaux caducs donnent l’impression d’être mort). Dans un second temps la plantule* rentre en période d’activité au printemps (sorte de retour à la vie) et Isildur guérit.
  • « Et quand s’ouvrit la première feuille, Isildur, qui était resté longtemps couché sur le seuil de la mort, se leva et oublia ses blessures. » (Le Silmarillion, Akallabeth)
  •  Arrive ensuite une période troublée, Elendil et les siens fuient Númenor puis combattent Sauron, finalement un nouvel Arbre Blanc est planté au début du Troisième Age ce qui représente un nouveau départ pour les survivants de Númenor.
  • On note un nouveau dépérissement de l’arbre avec la mort du roi Telemnar et de ses enfants lors de la Grande Peste, la couronne passant alors à un neveu.
  • Assez bizarrement lors du décès du roi Eärnur en 2050 TA qui marque l’interruption de la lignée royale en Gondor il n’est pas fait mention de la fin d’un Arbre Blanc : celui-ci ne meurt qu’en 2872 TA, au même moment que Belechtor II l’intendant du Gondor.
  •  L’Arbre Mort ne pouvant être remplacé, il est laissé sur place et ce jusqu’au « retour du roi ». Alors que le Gondor n’a plus de roi depuis plus de 800 ans, l’arbre et la lignée royale sont toujours associés, le renouveau de l’arbre dépend de la réapparition d’un héritier d’Elendil.

C’est effectivement ce qui se passe car de 2872 à 3919 TA l’Arbre Blanc disparaît de l’histoire pour ne réapparaître qu’avec l’avènement du roi Elessar.

Lors de la découverte de l’arbrisseau Gandalf a cette remarque :

« Il est resté caché ici sur la montagne au temps même où la race d’Elendil se tenait cachée dans les déserts du Nord »

(Le Seigneur des Anneaux, tome 3, livre 6, chapitre 5).

 

Si d’un point de vue temporel les descendants d’Elendil ont vécu cachés avant que l’arbre ne fasse de même, on retrouve malgré tout cette notion d’histoire parallèle entre l’Arbre Blanc et la lignée d’Elros.

Un dernier point est à mentionner, avant la découverte du nouvel arbre Aragorn à ce commentaire

« Mais je mourrai, dit Aragorn […]Qui, alors, gouvernera alors le Gondor […] si mon désir n’est pas exaucé ? L’Arbre de la Cour de la Fontaine est encore desséché et stérile. Quand verrai-je un signe qu’il doive jamais être autrement ? »

(Le Seigneur des Anneaux, tome 3, livre 6, chapitre 5).

 

A ce moment son mariage avec Arwen n’a pas eu lieu, il n’a pas d’héritier et l’arbre mort se dresse encore à Minas Tirith. La découverte du plant ne suffit pas, ce n’est qu’après que les premières fleurs de l’arbre se soient épanouis que le mariage a lieu. La floraison de l’arbre qui est pour lui le moyen de maintenir l’espèce correspond avec le mariage d’Aragorn et d’Arwen qui permettra de perpétuer la lignée d’Elros.

L’Arbre Blanc au début simple cadeau pour une noce finit par présider au mariage du dernier descendant d’Elros et de la fille d’Elrond. L’Arbre Blanc crée à l’origine pour les elfes qui l’offriront aux humains devient un lien entre les deux races.

III) Le Malinornë

Malinornë (au pluriel Malinorni) ou Ornemalin est le nom Quenya de l’arbre.
Il provient de ‘malina’ : jaune et ‘orne’ : arbre, ce qui donne Arbre Jaune
En Sindarin son nom est Mallorn (Mellyrn au pluriel). Composé de ‘mall’ : or et ‘orn’ : arbre. On peut le traduire par Arbre d’Or.

Le Malinornë est originaire de Valinor, il a été apporté sur Númenor comme de nombreuses autres espèces par les Eldar. L’espèce a prospéré uniquement dans la région du Nísimaldar où elle a formé de grandes futaies.

L’introduction de l’arbre sur la Terre du Milieu se situe aux alentours des années 730 du Second Âge, date du deuxième voyage au Lindon d’Aldarion qui donna des graines au roi Gil-Galad. Si l’on interprète littéralement le texte de Tolkien (« Tar-Aldarion, le sixième roi de Númenor, en fit cadeau au roi Gil-Galad du Lindon » Contes et Légendes Inachevés, Le Second Âge, Aldarion et Erendis) à cette époque Aldarion n’est pas encore roi de Númenor (il accède au trône en 883 SA) cependant les graines de Malinornë semblent un cadeau probable lors de sa deuxième rencontre avec Gil-Galad.

Le Mallorn ne devait jamais se développer sur ses terres et il les offrit à Galadriel qui les sema plus tard en Lothlórien où l’arbre s’épanouit.

Le seul exemplaire de Malinornë qui poussa en Terre du Milieu hors de Lórien fut celui offert par Galadriel à Sam Gamegie qui le planta dans le champ de Cul-de-Sac à Hobbitebourg, la première floraison eu lieu le 6 avril 1420 CC.

Le Mallorn est un arbre à très grand développement pouvant atteindre plusieurs dizaines de mètres de hauteur et une circonférence importante.

Son tronc unique, érigé, est recouvert d’une écorce lisse de couleur gris-argenté.

Il a un port régulier qui est approximativement ovoïde, ses premières branches démarrent assez haut sur le tronc, les branches sont dressées vers le ciel puis se courbent, sa cime se divise en maintes branches.

Comme pour l’Arbre Blanc on peut tenter de définir le modèle architectural du Mallorn. Le dessin de Tolkien « The Forest of Lothlorien in spring » nous donne une assez bonne image de l’arbre pour le rapprocher du modèle de Rauh*, c’est à dire un tronc monopode*, une croissance rythmique* et un développement des branches orthotropes*.

La feuille est vert pâle sur la face supérieure et recouverte d’un duvet* argenté sur la face inférieure, Tolkien compare l’aspect du limbe* à celle du bouleau mais en plus large ce qui nous donne une forme plus ou moins triangulaire. A l’automne elle prend une teinte or. Bien que caduques, les feuilles du Malinornë sont marcescentes* et l’abscission* n’a lieu qu’au printemps lorsque éclosent les premières fleurs. Les feuilles sont utilisées par les elfes de Lórien pour envelopper la nourriture, en particulier le lembas.

La floraison est continue du printemps à la fin de l’été, les premières fleurs apparaissent avant les nouvelles feuilles alors que le Malinornë est encore recouvert de sa parure hivernale. Les fleurs ont cinq pétales, de couleur jaune d’or elles sont seules ou réunies en petites grappes de deux ou trois fleurs.

Le fruit est une drupe* ressemblant à une petite noix argentée contenant la graine. La multiplication s’effectue par semis des graines.

Le Malinornë est une essence forestière utilisée essentiellement en futaies et bosquets, il peut également être employé en isolé comme l’exemplaire de la Comté.

Traditionnellement les elfes de Lórien construisent leurs habitations dans le houppier du Malinornë. Ces habitats vont d’une simple plate-forme, le talan, à la ville de Caras Galadhon et la demeure de Celeborn et Galadriel. Bien que Tolkien ne donne pas de dimension, la description d’un arbre assez vaste pour abriter « une maison, assez grande pour servir, sur terre, de châteaux aux Hommes » (SdA, t1, livre 2, chap 7) a de quoi surprendre et interroger.

Cependant elles ne sont pas invraisemblables, à titre de comparaison nous pouvons parler du Général Sherman, un Séquoia Géant (Sequoiadendron giganteum) situé dans le Séquoia National Park de Californie. Cet arbre est considéré comme l’être vivant le plus imposant, son poids est estimé à 1.2 millions de kg et son volume à 1415 m3 de bois pour une hauteur de 95 m, cette hauteur bien que des plus respectable n’en fait malgré tout pas l’arbre le plus grand (c’est un Séquoia de la Côte, Sequoia sempervirens, nommé le Grand Arbre qui détient cet honneur avec 112 m de haut en 1990). A mi-hauteur son tronc à un diamètre de 17.60 m, à 60 m il est encore de 3.60m. Et un age aux alentours de 2700 ans.

On peut également parler du Castagno dei Cento Cavalli (ou Arbre des Cent Chevaux), ce Châtaignier (Castanea sativa) de Sicile aurait en 1308 abritait d’un orage Jeanne la reine d’Aragon et son escorte de 100 cavaliers. Le tronc creux de cet arbre avait une circonférence 68 m en 1770.

 

Le Mallorn et l’Arbre aux 40 Ecus

Avant de finir cette partie, nous ne pouvons pas nous empêcher d’évoquer le Ginkgo biloba ou l’Arbre aux 40 Ecus. Il suffit de voir cet arbre à l’automne lorsqu’il a revêtu sa parure d’or pour le croire sorti des frontières de la Lothlórien.

Tolkien pouvait-il connaître cet arbre et s’en inspirer dans une certaine mesure ? C’est tout à fait possible d’autant plus que la Grand Bretagne possède des exemplaires de plus de 200 ans, le plus ancien se trouvant dans le jardin botanique de Kew (près de Londres). Un arbre qui en plus de ces qualités ornementales est le représentant d’une espèce présente sur terre depuis 200 millions d’années a de quoi stimuler l’imagination.

Un dernier détail amusant, le nom Ginkgo pourrait provenir d’un idéogramme chinois ‘yin-kuo’ ou ‘Yin Hsing’ qui signifierai ‘fruit d’argent’ (une référence probable à l’enveloppe lignifiée(19) de la graine contenue dans un fruit ressemblant à une prune et à l’odeur très désagréable) or le Malinornë possède un fruit de couleur argentée.

L’un des noms de l’arbre est ‘Ya tchio’ ce qui signifie ‘patte de canard’.

IV) Des Arbres par monts et par vaux

Après les Arbres de Valinor, l’Arbre Blanc et le Malinornë pour lesquels nous disposons de nombreuses informations, nous allons maintenant essayer de présenter d’autres espèces. Il est assez difficile d’en avoir un portrait complet car elles ne sont souvent que nommées et ont un rôle assez réduit.

On peut néanmoins dégager quelques éléments des fragments de texte et grâce à leurs noms.

La majorité des arbres présentés ici se trouvaient sur l’île de Númenor, en particulier à l’ouest de l’île au Nísimaldar. Les arbres poussant dans cette partie de l’île ont tous la particularité d’être persistants et odorants soit par la fleur, la feuille ou l’écorce, ce qui a donné ce nom signifiant les Arbres Aromatiques. Ces arbres ont été plantés en d’autre région de l’île mais ils s’y sont bien moins développés qu’en ce lieu.

Très peu ont poussé sur la Terre du Milieu et maintenant que le Pays de l’Offrande a été englouti, ces arbres sont perdus pour les Hommes.

La principale source est le texte « Une Description de l’Ile de Númenor » dans le quel on peut trouver sept espèces en plus du Mallorn, une huitième espèce est décrite dans « The Númenórean chapters ». On notera que toutes ces espèces furent amenées sur l’île de l’Ouest et offertes aux Humains par les elfes.

 

4.1) L’Oiolairë

Malinornë (au pluriel Malinorni) ou Ornemalin est le nom Quenya de l’arbre.
Il provient de ‘malina’ : jaune et ‘orne’ : arbre, ce qui donne Arbre Jaune
En Sindarin son nom est Mallorn (Mellyrn au pluriel). Composé de ‘mall’ : or et ‘orn’ : arbre. On peut le traduire par Arbre d’Or.

Nous avons là un arbre persistant au feuillage vert et odorant, il est dit que ses feuilles sont lustrées ce qui indique la présence d’une cuticule* épaisse (ou d’une couche de cire). Cet élément et l’association de l’arbre à des traditions de marin nous indiquent qu’il pousse sur les versants marins du Nísimaldar, il est donc résistant aux embruns et a sûrement une certaine tolérance vis à vis de la salinité du sol.

Il a surtout une importance dans les us et coutumes des marins, le texte « Aldarion et Erendis » nous apprend qu’un rameau d’Oiolairë est déposé (en principe par une femme de la famille du capitaine) à la proue d’un navire avant qu’il appareille. Ce rameau était nommé la Branche du Retour ou le Vert Rameau. Cette coutume pratiquée à Númenor provient des Eldar, on doit pouvoir la raccrocher plus particulièrement aux Teleri, qui l’accomplissaient en signe d’amitié avec Ossé et Uinen.

L’association d’un arbre à des divinités marines nous fait penser au Frêne qui est dédié à Poséidon et à Jason qui incorpora un morceau de Frêne sacré à son navire. Mais on peut aussi se souvenir du rameau d’Olivier qu’une colombe apporte à Noé.

 

4.2) Le Yavannamirë

Nom Quenya composé de ‘mirë’ : joyau et du nom Yavanna
On peut le traduire par Joyau de Yavanna.

La description du Yvannamirë donnée dans Une Description de l’Ile de Númenor (« le yavannamirë, avec ses fruits sphériques et de couleur écarlate ») est courte mais pas dénuée d’intérêt. C’est le seul arbre où nous avons une description du fruit qui est mise en avant, pour les autres Tolkien s’attache à nous décrire le feuillage et les fleurs. Ceci nous semble indiquer que le Yavannamirë est un arbre fruitier, cette information est confirmée par le nom de l’arbre qui correspond à Joyau de Yavanna. La Valaquenta nous dit que Yavanna est « Celle qui apporte les fruits », la nature comestible des fruits de cet arbre paraît assurée.

Le type de fruitier est plus délicat à déterminer, un fruit de forme sphérique et de couleur écarlate peu aussi bien s’appliquer à une pomme ou une pêche cependant l’arbre pousse au Nísimaldar, il a donc la caractéristique supplémentaire d’être odorant. Ce point nous laisse penser qu’il s’agirait d’un agrume car ce sont des arbres qui dégagent une forte fragrance aussi bien par le feuillage que par les fruits ou les fleurs de plus les agrumes sont des arbres persistants tout comme le Yavannamirë.

 

4.3) Le Lairelossë

Nom Quenya, on y trouve ‘laire’ : été et ‘losse’ qui désigne à la fois la neige et une inflorescence blanche.
Le nom peut se traduire par Neige d’été.

Les seuls éléments que nous avons sur cet arbre persistant c’est la décomposition de son nom qui nous les fournit.
Il produit des fleurs blanches regroupées en inflorescence* qui sont sûrement odorante. Nous avons là une floraison estival.

 

4.4) Le Nessamelda

Nom Quenya provenant du nom de Nessa et de ‘melda’ : être aimé de /être apprécié de.
Une traduction possible est Aimée de Nessa.

On ne sait rien sur cet arbre hormis qu’il est persistant et odorant, son nom peut nous fournir quelques éléments mais de manière incertaine. Nessa est la sœur d’Oromë et l’épouse de Tulkas, elle aime les cerfs et les biches ainsi que la danse.

A partir de là on peut imaginer que c’est une essence forestière, probablement de futaie, assez proche du Hêtre (Fagus sylvatica) cher à Oromë avec des feuilles d’un vert tendre comme celles des jeunes pousses. Les fleurs pouvant alors se présentant sous forme de chatons dorés odorants.

 

4.5) Le Vardarianna

Nom Quenya composé de ‘anna’ : don et du nom de Varda.
Ce qui donne Don de Varda.

De même que pour le Nessamelda nous en sommes réduit à quelques hypothèses basées sur le nom de l’arbre. Varda étant la Dame des Etoiles on peut penser que cet arbre porte des fleurs blanches ayant une forme étoilée, ces fleurs s’ouvrent la nuit et dégagent leur parfum pour se refermer au matin. Les feuilles persistantes doivent être d’un vert assez foncé sur la face supérieure et porter un duvet* argentées sur la face inférieure.

 

4.6) Le Taniquelassë

Nom Quenya, ressemblant de Taniquetil.
On y trouve ‘nique’ issu de ‘ninque’ : blanc et ‘lasse’ : feuille.

Une traduction éventuelle : Feuille du Taniquetil ou (en se basant sur la traduction littéraire de Taniquetil “haute pointe blanche”) « haute pointe à feuille blanche »

Encore une fois nous n’avons pas d’information sur cet arbre odorant.

Son nom proche de Taniquetil peut nous suggérer qu’il pousse sur les pentes de la demeure de Manwë, à partir de là on pensera à une espèce de montagne qui supporte le froid et la neige. Cependant la majorité des feuillus qui poussent en montagne sont caduques ce qui n’est pas le cas du Taniquelassë. Bien sur on peu concevoir qu’il se développe sur les versants les plus bas de la montagne où il n’y a pas forcement de neige et de froid intense.

En revanche son nom peut nous indiquer soit que ses feuilles sont blanches ou du moins qu’elles sont panachées* de blanc (il semble plus probable que la feuille soit panachée car la couleur blanche au niveau des feuilles indique une absence de chlorophylle*, si toutes les feuilles de l’arbre sont blanche alors ce n’est plus un végétal autotrophe*. Il obtiendra la matière organique qui lui est nécessaire soit par parasitisme soit par symbiose.) ou qu’elles possèdent un duvet blanc sur la face inférieure voir sur toute la feuille.

 

4.7) Le Laurinquë

Nom Quenya, avec ‘laure’ : lumière dorée et probablement ‘*iñkwa’.
Ce qui peut donner Le Doré.

Nous quittons maintenant le Nísimaldar pour le Sud-Est de l’île, le Hyarrostar où pousse le Laurinquë.
Cet arbre fût lui aussi amené par les Elfes mais il n’est pas odorant.

Sa floraison est constituée de grappes de fleurs jaunes ressemblant à celle de Laurelin, il est d’ailleurs uniquement employé de manière ornementale pour cette floraison et il ne possède pas d’autres usages ou propriétés.

Les Númenoréens croyaient qu’il était issu de Laurelin, mais ce n’est pas le cas. Cette ressemblance avec l’un des arbres de Valinor nous laisse penser que le Cytise Pluie d’Or (Laburnum x wateri ‘Vossii’) a également servi de base au Laurinquë. L’aspect de ses fleurs, l’importance de son intérêt ornemental et le fait qu’il n’est pas d’autre usage correspond assez bien à cet arbuste.

Le Cytise Pluie d’Or, un survivant de Númenor ?

 

4.8) Le Lavaralda

Nom Quenya, ‘lavar’ peut être équivalent à ‘Laure’ : lumière dorée et ‘alda’ : arbre massif, ce qui nous ramène à un nom comme Arbre Doré.

Cet arbre apparaît uniquement dans « The Númenórean chapters » , il semble avoir totalement disparu de la flore de l’île dans les autres récits concernant Númenor.

Le Lavaralda provient d’Eressëa, il fut amené sur l’île sous forme de graine.
C’est un arbre qui résiste aux embruns, on l’utilise pour former des haies il doit donc être assez dense et avoir un port compact.
Ses feuilles sont vertes sur la face supérieure avec un duvet* dorée à la face inférieure.
Lors de la floraison les fleurs recouvrent les rameaux d’une manière proche de celle des arbres fruitiers. Blanches avec des reflets jaunes, les fleurs dégagent un parfum agréable et apaisant qui se diffuse largement, les marins l’associent à la senteur de Tol Eressëa.

 

4.9) Le Lebethron

Nom Sindarin, les versions antérieures du nom sont lebendron puis lebethras
Son étymologie est incertaine, probablement LEPET qui donne ‘leben’ : cinq et ‘lebed’ : doigt plus peut être ‘doron’ : chêne (lebendron)

On peut proposer comme traduction Chêne aux cinq doigts.
Cette hypothèse et d’autres sur le nom de l’arbre sont développées sur le site Hiswelókë.

Une autre espèce d’arbre est mentionnée par Tolkien, celle-ci nous la trouvons dans Le Seigneur des Anneaux, il s’agit du Lebethron.

Nous n’avons pas de description de cet arbre mais nous savons qu’il pousse dans les Montagnes Blanches car les montagnards de cette région l’utilisent et en font des bâtons de marche, à partir de là on peut en déduire que c’est une espèce de montagne sans doute caduque qui résiste au froid, aux gelées et à la neige.

Si l’on se base sur la décomposition du nom donné précédemment, cet arbre possède des feuilles palmées à cinq lobes ressemblant à celles d’un Platane (Platane d’Orient Platanus orientalis et Platane à feuilles d’érable Platanus x acerifolia) ou de certains Erables (Erable plane Acer platanoides et Erable sycomore Acer pseudoplatanus).

Son bois doit être dur et résistant tout en restant relativement facile à travailler, une indication «behind them walked four men in the high helms and armour of the Citadel, and they bore a great casket of black lebethron bound with silver » (non traduite en français : « derrière eux marchaient quatre hommes vêtus de l’armure et des hauts casques de la Citadelle, qui portaient un grand coffret de lebethron cerclé d’argent » (SdA, t3, livre6, chap 5) nous laisse penser que le bois est naturellement de couleur noire ou qu’il fonce à l’air libre (on peut également considérer qu’il a été teinté). Il est utilisé en ébénisterie, le coffret contenant la couronne du Gondor est en Lebethron de même que les bâtons de marche offert par Faramir à Frodon et Sam, il est également apprécié pour la construction et probablement d’autres domaines où l’on utilise du bois d’œuvre. Ceci nous indique aussi que le Lebethron doit posséder un tronc droit et assez grand.

 

4.10) Un arbre de Fangorn

En plus des Ents et des Huorns qu’il serait faux et précipité de considérer comme des arbres, la forêt de Fangorn semble posséder au moins une espèce particulière. C’est ce type d’arbre qui apparemment constitue en partie les murs et le toit de la maison d’Ent où Sylvebarbe conduit les Hobbits :

« les murs montaient en pente jusqu’à la hauteur de cinquante pieds ou plus, et le long de chacun se dressait un bas-côté d’arbres dont la taille croissait aussi à mesure qu’ils avançaient à l’intérieur. […] cette voûte était le seul toit de la salle, à part des branches d’arbres qui, à l’extrémité intérieure, couvraient de leur ombre tout le sol, ne laissant qu’une large allée découverte au milieu. »

(Le Seigneur des Anneaux, tome 2, livre 3, chapitre 4)

 

Nous avons là un arbre assez dense et touffu qui atteint une quinzaine de mètres, ses feuilles persistantes sont lisses et de couleur vert foncé. La particularité la plus étonnante de ces arbres est la teinte qu’ils prennent lorsque Sylvebarbe illumine sa demeure :

« les Hobbits virent que les arbres de la cour avaient aussi commencé à luire, faiblement au début, puis de plus en plus fort, jusqu’à ce que chaque feuille fût bordée de lumière : certaines étaient vertes, d’autres dorées, d’autres encore rouges comme du cuivre ; tandis que les troncs semblaient être des piliers de pierres lumineuses. »

(SdA, t2, livre 3, chap 4).

 

On peut supposer que c’est le reflet de la lumière sur les arbres qui leur donne cette apparence et que les arbres ne produisent pas de lumière par eux même (ce qui nous semble être l’apanage des Arbres de Valinor)

Il y a un point surprenant ici c’est l’absence de nom pour cette espèce, il est possible que ce nom existe dans un document que nous n’avons pas consulté. Mais Tolkien considérait peut-être qu’il était hâtif et irréfléchi de le donner.

Conclusion : Les Arbres de Tolkien

Les arbres que nous venons de voir présentent un certain nombre de caractéristiques communes, d’une part au niveau de leur apparence, ces arbres ont souvent des troncs couverts d’une écorce lisse de couleur blanc argenté, leurs fleurs sont blanches ou jaunes, les feuilles sont vertes sur la face supérieur et possèdent un duvet doré ou argenté sur la face inférieur. On peut imaginer que ces éléments récurrents sont des traits appartenant à des arbres que Tolkien connaissait et aimait, définir de quelle espèce il s’agit n’est pas chose facile (et surtout assez arbitraire) car l’un ou l’ensemble des caractères peut s’appliquer à de nombreux arbres, nous avons déjà parlé de l’Arbre aux Quarante Ecus ou du Cytise Pluie d’Or mais on pourrait également citer les Eucalyptus qui avec leur feuillage bleu-vert, leurs fleurs jaunes, une écorce caduque qui laisse un tronc lisse de couleur blanc crème et leur parfum auraient une place toute trouvée au Nísimaldar.

Mais on peut trouver d’autres points communs, ils proviennent des Terres Immortelles et les Elfes les ont offerts aux hommes de Númenor qui ont amené certaines espèces sur la Terre du Milieu. L’arbre a ici une origine « féerique » il rentre dans les merveilles que l’on trouve chez les Valar et les Elfes, l’aspect merveilleux de la Lothlórien provient en partie de la présence des Mellyrn, et que dire de la lumière de Laurelin et Telperion.

C’est aussi un don, un présent fait aux plus nobles tel que l’Arbre Blanc à Aldarion ou les graines de Malinornë à Galadriel mais également aux plus humbles avec la graine de Mallorn offerte à Sam.

Tolkien en amoureux des arbres nous les présentent et nous les offrent dans toute leur beauté ainsi qu’avec toute la majesté et la magie qui leur ont toujours été associée dans les contes et les légendes.

Le chemin qui nous a permis de rencontrer ces arbres fabuleux s’arrête ici ou plus exactement nous le quitterons à cet endroit car comme l’a écrit le professeur Tolkien :

« La route se poursuit sans fin
Descendant de la porte où elle commença.
Maintenant, loin en avant, la route s’étire »

(Le Seigneur des Anneaux, tome 1, livre 1, chapitre 1)